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La participation politique des allochtones en Belgique
Elus d'origine non-européenne en Belgique

Evrahim BARAN

(écrivain d'origine iranienne)

2000 tête de liste Ecolo aux communales à Tubize (Brabant wallon) 

avril 2001 siège comme indépendant

http://www.dhnet.be/dhjournal/archives_det.phtml?id=605

La Dernière Heure 02/04/2001

TUBIZE

Evrahim Baran siégera comme indépendant

Au beau milieu du conseil communal de Tubize, Evrahim Baran créa la surprise en déclarant que dorénavant, je siégerai de manière indépendante et je prends mes distances avec le groupe Ecolo. Lors d'une suspension de séance, le conseiller a expliqué sa position. Cela fait une petite semaine que je ne fais plus partie du groupe Ecolo car il y a une divergence politique très grave. En fait, ma locale s'éloigne de la position officielle que j'ai défendue. Il faut qu'elle détermine sa position et elle n'a pas le courage de le faire. Cependant, je suis toujours un écolo convaincu.

A. M.

http://fr.groups.yahoo.com/group/suffrage-universel/message/2046

Suffrage Universel - Vendredi 19, Mars 2004 10:10

[©Mehmet Koksal info@mehmet.be 19/03/2004 reproduction autorisée avec mention obligatoire de la source: article publié par la liste de Suffrage-Universel et www.minorites.org]

Démissions à Tubize

Lorsque les eaux montent...

Entre deux démissions et une non-prestation de serment, le Conseil communal de Tubize, fief de Raymond-le-Pieux (alias Langendries - lire l’excellent papier de Luc Delfosse dans Le Soir du 31 janvier 2003), vit actuellement une belle histoire politique. Après avoir créé une première fois la surprise en 2001 en quittant Ecolo, l’actuel conseiller indépendant d’origine iranienne Evrahim Baran a annoncé sa démission à mi-mandat. Au niveau local, la première conséquence est qu’Ecolo récupère son siège par la suppléance mais où Abdelwahlid Ben Abbou ne semble pas trop motivé pour prêter serment. “Conformément aux articles 80 et 81 de la loi communale, il sera convoqué une deuxième fois par lettre recommandé et s’il ne se présente toujours pas, on passera alors à la suppléance suivante”, nous souffle un juriste local.

Ecrivain et poète belge d’origine iranienne, Evrahim Baran semble avoir fui la politique comme Ali, son personnage, échappe à madame Faux dans son roman “De ce côté du Mur”. Evrahim aurait-il fait le mur? En tous cas il fuit son pays après avoir participé à la révolution iranienne. Il espère ensuite trouver à Bruxelles, coeur de l’Europe “moderne et civilisée”, son chez-soi ou son véritable soi. Madame Faux de son côté, la métaphore dans notre article pour la politique, fuit l’engagement, le temps qui passe inexorablement au-dessus d’elle et l’ennui que les hommes procurent... mais tombe amoureuse du héros. Par l’entremise de quelques lettres persanes, Evrahim décide subitement de disparaître du Conseil communal de Tubize. La première interrogation nous saute aux yeux: l’ayatollah Langendries serait-il aussi redoutable que feu Khomeiny? Dans les deux cas, la décision d’Evrahim est tout aussi radicale: l’exil, d’abord physique en Iran et ensuite politique à Tubize.

“C’est un homme brillant, poète et qui a fait je pense quelques études de droit dans son pays d’origine avant de venir en Belgique, explique Michel Pirson (Ecolo). Il a exercé auparavant plusieurs métiers comme taximan, importateur de tapis, vendeur de glaces. M. Baran était devenu le chef de groupe Ecolo suite aux dernières élections communales mais il a décidé de quitter le parti après de fortes divergences au sein de la locale. En gros, il pratiquait une liberté totale dans la prise de décision sans en référer à la locale. Cela a été très loin où le groupe a même demandé son exclusion. C’est vrai que chez nous ce n’est pas comme au PS où 2 personnes décident et le reste avalise. Chez Ecolo, il faut rendre des comptes à la locale.Ensuite, il a siégé comme indépendant jusqu’à ce jour. Je pense qu’il s’est rendu compte qu’il n’arrivait pas à faire du boulot tout seul. C’était dur pour lui car à chaque intervention, il se faisait ramasser par les conseillers et les échevins. Il parlait aussi de manière très imagée. Je me souviens qu’il commençait une interpellation avec une phrase du style: ‘Lorsque les eaux montent, la maman sage reprend l’enfant sur ses genoux...’ Ils intervenaient un peu sur tous les sujets et particulièrement sur les finances.”

Même son de cloche du côté de quelques mandataires socialistes. “C’est vraiment quelqu’un de bien, précise Stéphane Mahauden (PS). Je pense qu’il a démissionné par déception. Il s’attendait à de grands débats mais la politique communale, c’est très concret. On parle des problèmes de rénovation de rues, des problèmes dans les écoles. Il s’attendait à de grands discours politiques...” Najat Mohdad (PS) a également connu Evrahim Baran au sein du Conseil communal: “J’ai eu l’impression que c’était quelqu’un de très actif sur la commune mais ce n’est pas toujours évident quand vous êtes dans l’opposition. Je me souviens seulement de l’avoir vu lors de ma prestation de serment en décembre 2003.”

Son successeur appelé à siéger est Abdelwahlid Ben Abbou. 43 ans, ouvrier au gymnase local, d’origine marocaine, M. Ben Abbou jouit d’une certaine popularité au sein des Tubizois. Placé au queue de liste Ecolo “pour faire plaisir à Madame Maust”, il est remonté dans l’ordre de suppléance jusqu’à la 6e place. “C’est le petit risque de la réforme électorale. Dès qu’une personne est sur la liste, il a des chances d’être appelé à siéger”, explique Michel Pirson (Ecolo). M. Ben Abbou est membre de la Ligue des familles et très actif au sein des Clos de la Bruyère, des logements sociaux à forte densité de populations d’origine maghrébine. Il a également organisé des cours de langue arabe en dehors de la mosquée. Du côté d’Ecolo, on temporise pour l’instant. Si Abdelwahlid ne veut pas siéger, c’est Liliane Bouffioux qui prendra sa place. Siègera, siègera pas? La réponse au prochain conseil communal.

Au parti socialiste, on annonce également la démission d’Aurore Godart, ce qui appellera à siéger le syndicaliste (ex-Forges de Clabecq) d’origine italienne, Jacques Tosolini (62 ans), membre de la commission “Immigrés” de la FGTB et Président des Amis du Château. Quel château? Un témoin nous explique qu’à l’époque les travailleurs italiens s’installaient d’abord à l’Hôtel des Célibataires, dans le bas de la rue de la Déportation. Une fois que les femmes arrivaient, les couples s’installaient au “Château des Italiens”. Quelle belle image: amener sa femme habiter dans un château! Mais est-ce vraiment bien socialiste ?

Mehmet Koksal

Entretien avec Evrahim Baran (ex-conseiller communal à Tubize)

Le déphasage parfait

MK: Quel est la raison officielle de votre démission?

E. Baran: Officiellement, je n’ai fourni aucune explication. J’ai simplement fait une déclaration pour dire que je quittais mes fonctions politiques. Mais en réalité, je ne parvenais pas à m’identifier à ce Conseil communal. Je voulais tellement m’identifier au travail et à ce que représente à mes yeux un Conseil communal que l’exercice devenait difficile. Je ne percevais pas la correspondance de nos actions avec ce qu’on est censé attendre de la politique locale. On devrait agir comme un parent ou comme le précise la loi ‘en bon père de famille’ mais je ne voyais pas la gestion d’un bon père envers les administrés. Finalement, je me suis rendu compte que j’étais en déphasage parfait avec ce Conseil et j’ai pris la décision de démissionner de tous mes mandats politiques.

MK: Vous êtes à mi-mandat, pourquoi avoir démissionné maintenant?

E. Baran: Vous savez, j’ai pris une mauvaise habitude qui me vient sans doute du monde littéraire, celle de respecter les autres et de me voir respecter...

MK: Mais c’est une bonne habitude ça...

E. Baran: Certainement pas en politique. Au Conseil communal, vous ne pouvez pas imaginer comment les gens se moquent de vous, c’est incroyable! Le problème est qu’ils n’écoutent même pas ce que vous dites donc peu importe finalement votre discours. Pris individuellement, une personne médiocre ne me dérange pas vraiment. Au contraire j’apprécie même le médiocre car on peut peut-être tenter un écrit sur son vécu ou son parcours mais quand les médiocres se mettent ensemble... ça devient ingérable! Le jeu politique est comme une pute qui se donne à tout le monde et je n’ai pas voulu entrer dans ce jeu. C’est vraiment l’inverse du monde littéraire, un univers hautement plus respectable.

MK: Vos origines ont-elles joué un rôle dans votre parcours politique?

E. Baran: Pas vraiment. Je suis belge mais pas d’origine gauloise (rires). En réalité depuis l’âge de 12-13 ans, je fais de la politique. Dans mon pays d’origine, en Iran, j’ai fait la révolution de 1979. Ensuite, je me suis révolté contre Khomeiny, ce qui m’a valu mon exil. Arrivé en Belgique, mon côté bourgeois m’a poussé à m’investir sur le terrain politique et je me souviens qu’à l’époque dans mon ancien parti Ecolo, il n’y avait rien. En réalité, à 4 personnes, on a rédigé un programme, on a fait une très bonne campagne et le parti a gagné d’un coup 3 sièges au Conseil communal. Mais je dois dire que mis à part quelques éléments, le groupe dont j’étais le chef de groupe était également médiocre!

MK: Ca devenait donc ingérable...

E. Baran: Mais bien entendu. Quand les gens parlent, ils ne se rendent pas toujours compte de leur parole. Je tentais d’expliquer à mon groupe que j’avais été en première ligne et qu’on avait pris des engagements vis-à-vis des électeurs. On ne peut pas changer comme ça d’avis du jour au lendemain. Si vous voulez changer d’avis, attendez 6 ans et ensuite faites-vous réélire avec le nouveau discours. Ca n’a pas marché et j’ai donc quitté Ecolo en 2001 pour essayer de faire entendre ma voix jusqu’à aujourd’hui. Puis, je me suis dit:“Evrahim, ce n’est pas un milieu pour toi et puis la vie est trop belle...”

MK: Pensez-vous avoir encore un avenir en politique?

E. Baran: J’ai le virus de la politique et donc je serai toujours attaché à la vie politique mais je ne pense plus m’impliquer comme mandataire. Je travaille comme traducteur dans le domaine des réfugiés et occupe une fonction dans une association bruxelloise, donc je compte poursuivre l’action à ce niveau.

Propos recueillis par MK

Infos:

www.tubize.be Cette commune du Brabant wallon résulte de la fusion des anciennes communes de Clabecq, Oisquercq, Saintes et Tubize.

Superficie : 3.376 ha.

Population : plus de 22.000 habitants.

Collège: Bourgmestre + 6 échevins

Majorité: 7 RC (PSC+PRL), 7 PS

Opposition: 3 Ecolo, 3 SPT (Socialisme et participation tubizienne, membre du Mouvement Socialiste, une dissidence du PS en Wallonie)


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