Les Musulmans de Belgique






 

Compte-rendu de la conférence de presse de l’Assemblée Générale des Musulmans de Belgique (29/04/2002)

 

Compte-rendu de la conférence de presse de l'Assemblée générale des Musulmans de Belgique du 29 avril 2002

 

Mohamed Boulif (président de l'Assemblée Générale des Musulmans)

M. Boulif dénonce un putsch intervenu au sein de l'Exécutif dees Musulmans de Belgique, putsch qui entraîne la spoliation du vote de décembre 1998.

Il rappelle qu'en 1991 déjà 30.000 personnes avaient élu un Conseil supérieur des Musulmans de Belgique, que les autorités belges n'ont jamais reconnu, mais avec lequel elles ont fini par discuter. Suite à l'événement déclencheur que fuurent les enfants assassinés et les funérailles de Loubna Benaïssa, les autorités belges proposèrent l'organisation d'élections à l'Exécutif provisoire des Musulmans. Le 13 décembre 1998, une Assemblée Générale fut élue démocratiquement par 45.000 électeurs (sur 72.000 inscrits) et reconnue par les autorités, il n'y eut pas de contestation des élections. Sur les 68 membres de cette assemblée (51 élus et 17 cooptés), 58% étaient de nationalité belge.

Après ces élections, il fallut désigner les 17 membres du conseil d'administrtaion, l'"Exécutif des Musulmans de Belgique". Ca se passa comme si on disait "vous pouvez jouez en coupe du monde, mais seulement avec des réservistes et des amateurs". Des arbitres qui n'étaient pas habilités à cette tâche intervinrent, firent pression à cause de la proximité des élections législatives en juin 1999. Les membres de l'AG acceptèrent le compromis mais, première entorse à l'accord avec les autorités, plus de 50% des membres furent écartés. Jean Hallet, qui était jusqu'il y a peu président du conseil d'administration du Centre pour l'égalité des chances, a reconnu à l'époque que les Musulmans étaient victimes d'une grande injustice mais que demain cette injustice serait réparée.

En fin de compte, seuls 16 membres sur 17 furent désignés, le 17ème siège restant vacant. Un règlement d'ordre intérieur (ROI), un conseil d'administration une assemblée générale furent mis en place.

Après un an, on a constaté des manquements, des crispations, des querelles. Certains croyaient qu'ils auraient des mandats comme des parlementaires, des voitures de fonction... Au bout d'un moment, ça n'allait plus, des membres se chamaillaient devant le chef de cabinet du ministre de la Justice, ne venaient plus aux réunions, deux ont démissionné pour dénoncer la "parodie". En juin-juillet 2000, le ministre promit de doubler le budget, mais revint sur sa promesse en novembre parce que le budget initial correspondait aux réalisations véritables de l'Exécutif.

A ce moment, l'Assemblée générale intervint à la demande de l'Exécutif parce que l'organe ne fonctionnait plus. Une AG extraordinaire, prévue dans le ROI, fut convoquée en décembre 2000 par le président de l'Exécutif pour émettre un vote de confiance. Il s'agissait soit de remplacer quelques membres si le vote était positif, soit d'élire un nouvel Exécutif si le vote était négatif. Le ministre de la Justice fut averti et ne s'opposa pas au processus. Seuls 8 membres sur 58 présents soutinrent l'Exécutif, 48 votèrent contre, les autres s'abstenant. Un nouvel Exécutif de 17 membres fut élu, incluant certains membres de l'Exécutif initial.

A ce moment, l'Exécutif fut convoqué avec les représentants du Centre pour l'égalité des chances et le Dr. Yassine Beyens [président de l'Exécutif provisoire en 1994-98] par le chef de cabinet du ministre de la Justice, qui leur déclara qu'il n'acceptait pas de reconnaître un nouvel Exécutif, au nom d'un "pacte" suivant lequel le mandat était de 5 ans. En somme, tout le monde reconnaissait que ça ne marchait plus mais qu'il fallait quand même maintenir l'ancien Exécutif. De toute évidence, les choses n'étaient pas transparentes, il y avait des ficelles derrière tout ça.

Cette fois, l'AG consulta les deux plus éminents constitutionnalistes belges (Francis Delpérée et Marc Uyttendaele), qui confirmèrent qu'il y avait bien eu ingérence dans les cultes de la part du gouvernement, que ce soit par le "screening" ["tamisage", "filtrage", le processus d'élimination de candidats jugés indésirables par les autorités lors du choix de membres de l'Exécutif parmi ceux de l'AG] ou pour les ingérences ultérieures de la part du ministre.

De janvier 2001 à septembre-octobre 2001, des négociations eurent lieu avec les membres désavoués de l'Exécutif, qui se maintenaient dans leurs fauteuils avec le soutien des autorités. En fin de compte, un courrier fut envoyé par l'intermédiaire d 'un avocat aux membres qui refusaient de se démettre.

Pendant ce temps, le chef de cabinet du ministre de la Justice mentait à l'Exécutif, en continuant à discuter avec lui de la reconnaissance des mosquées sur une base provinciale, alors que, comme le Synode protestant le leur expliqua, cette procédure avait été transférée aux régions de par les accords de la Saint-Polycarpe quelques mois plus tôt. Quel jeu jouait donc le cabinet ?

L'AG fit alors intervenir des organisations de base, la Fédération des mosquées et la Ligue des imams, sans succès; des lettres furent envoyées au ministre pour la reconnaissance du nouvel Exécutif, en vain.

En fin de compte, des membres de ce qui restait de l'Exécutif initial ont profité de la maladie du président et d'un séjour à l'étranger pour désigner une direction collégiale de 4 personnes, non prévue dans l'ordre du jour de leur réunion ni dans le ROI ni dans les accords de 1998, sans demander le soutien de l'AG. Une présidence collègiale fut alors illégalement proclamée, soutenue par une certaine presse qui dénonçait le "putsch" il y a un an. On se demande aussi à quel titre une employée du Centre pour l'égalité des chances [Monique Renaerts] traînait dans les couloirs de l'Exécutif à ce moment-là, répondait au téléphone, conseillait aux mosquées de ne pas organiser de réunions sur le sujet.

Pendant le même temps, le ministre a demandé à l'AG de nommer des remplaçants pour les membres démissionnaires de l'Exécutif. Et son chef de cabinet vient d'être nommé ambassadeur dans un pays musulman.

 

Nordine Maloujahmoune (président de l'Exécutif des Musulmans - l'initial, et l'intérimaire de janvier 2001)

Le dernier putsch ets l'aboutissement d'un processus de pourrissement de la situation depuis un an et demi. Le chef de cabinet du ministre de la Justice m'a insulté au téléphone, il m'a dit "vous vous croyez au souk ?", alors que je demandais une augmentation de budget. Il y a bel et bien eu volonté de la part de ce chef de cabinet de laisser pourrir le dossier parce qu'il savait que de toute façon il partait le 15 avril 2002.

54% de la population belge, d'après un sondage, considère que la communauté musulmane ne peut pas être considérée comme une communauté à part entière.

Il y a eu ingérence d'une employée du Centre pour l'égalité des chances dans les locaux de l'Exécutif pendant l'absence du président, celui-ci a dû requérir un huissier et un serrurier pour avoir à nouveau accès à son bureau parce que les serrures avaient été changées en son absence. Cela s'était déjà passé une première fois auparavant.

 

Georges-Henri Beauthier (avocat de l'AG des Musulmans)

Une procédure en référé sera plaidée lundi prochain [6 mai], elle a été introduite voici plusieurs jours contre les 4 putschistes (3 pour le ressort judiciaire de Bruxelles, 1 dans un autre ressort), avec une requête en intervention volontaire de la part du président de l'Exécutif.

 

Mohamed Boulif

Tient à préciser qu'il n'y a pas eu de tensions entre nationalités d'origine, "nous sommes tous belges". En réponse à une question de la salle, il précise qu'une action judiciaire contre le ministre de la Justice n'est pas actuellement à l'ordre du jour. En réponse à une autre question, il répond (et N. Maloujahmoune confirme) que des représentants d'autres cultes s'inquitent également de ces ingérences du ministre dans les affaires internes d'un culte reconnu.






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