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Elections musulmanes 2005
"Le Soir" du mardi 26 avril 2005
L'Exécutif musulman prend forme
Les 68 élus du scrutin musulman sont officiellement installés ce mardi.
Principaux concernés, les Turcs et les Marocains s'accordent sur l'Exécutif.
Vainqueurs incontestés du scrutin organisé en vue de constituer les organes représentatifs de l'islam belge, les Turcs font un geste à l'égard de la communauté marocaine : ils se contenteront de huit sièges sur 17, et de la présidence, à l'Exécutif des musulmans. Soit une délégation minoritaire, alors qu'ils auraient pu prétendre occuper 10 mandats.
Autre concession : la communauté turque cède aux élus d'origine marocaine la présidence de l'Assemblée générale, dont les 68 élus seront officiellement installés ce soir (elle compte, pour rappel, 40 Turcs, 20 Marocains, 2 convertis et 6 représentants des " autres appartenances culturelles ", soit 3 Pakistanais, 2 Albanais et un Libanais).
Malgré ces marques " de bonne volonté " et de multiples réunions informelles, ces dernières semaines, la composition de l'Exécutif reste en chantier. Plusieurs sources, au sein des deux principales communautés concernées, s'accordent néanmoins sur trois scénarios de répartition des 17 mandats exécutifs : l'instance compterait 8 Turcs, 6 Marocains, 3 " autres " (Pakistanais et Albanais) et pas de converti (8-6-3-0) ; une variante à 5 Marocains et un converti (8-5-3-1) ; ou une formule comptant 6 Marocains, 2 " autres " et un converti (8-6-2-1).
Quelle que soit la clef définitive, elle vise à corriger le biais d'un scrutin très controversé, dont les résultats ne reflètent absolument pas la communauté musulmane de Belgique, où les 200.000 citoyens d'origine marocaine sont les plus nombreux, devant les Turcs (120.000), les Albanais (40.000) et les Algériens (20.000).
Nous devons débattre de ces répartitions avec les 68 élus de l'assemblée, dès ce mardi soir, nous confie Hacer Düzgün, candidate turque à la présidence, mais sans précipitation. Puis soumettre notre proposition à la ministre des Cultes, Laurette Onkelinx, qui seule a le pouvoir de l'avaliser.
Nous ne voulons pas d'un Exécutif turc, ajoute Coskun Beyazgül, autre candidat déclaré à la présidence, mais d'une instance qui représente effectivement la communauté musulmane de Belgique dans toute sa diversité.
En fait, si les Turcs se sont résignés à céder la majorité, à l'Exécutif, rien n'est réglé quant à la répartition des sièges entre les Marocains (5 ou 6 sièges ?) et les communautés minoritaires (3 ou 4 sièges). Les Albanais se contenteront-ils d'un mandat exécutif alors que les Turcs envisagent d'en proposer deux aux Pakistanais ? Les convertis accepteront-ils de se passer de représentation ou d'être représentés par une candidate chiite, minoritaire au sein de cette minorité ? Autant de questions qui restent ouvertes.
La ministre des Cultes, qui comptait sur la désignation rapide d'un Exécutif devra patienter... Pour gérer les affaires courantes (factures à honorer, etc.), on a donc soufflé l'idée aux élus de l'AG de désigner un bureau temporaire, qui pourrait être officialisé par voie d'arrêté ministériel. Dans l'attente d'un Exécutif en bonne et due forme.
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Le critère électoral privilégie une vingtaine de candidats
Qui siégera à l'Exécutif des musulmans de Belgique ? Rien n'est arrêté, mais on connaît, pour chaque catégorie électorale, les élus de l'Assemblée générale (AG) les mieux placés (électoralement, du moins) pour revendiquer un des 17 mandats exécutifs. Voici les noms qui émergent, parmi les 68 élus de l'AG, en fonction de leur popularité au scrutin (voix de préférence par rapport au nombre de voix exprimées dans leur circonscription), ce qui n'est pas, rappelons-le, un critère nécessaire ou suffisant pour être élu à l'Exécutif...
Marocains. Sur base du seul critère électoral, donc, les candidats d'origine marocaine les mieux placés pour revendiquer un mandat à l'Exécutif sont : Mohamed Didbih (Flandre-Occidentale), Mohamed Ben El Mostapha (Brabant wallon), Abdellah Sabbani (Namur), Brahim Bouhna (Brabant flamand), Nordine Taouil (Anvers), Mouloud Kalaai (Limbourg) et, loin derrière, Benjelloul Kissi (Bruxelles).
Turcs. En tenant compte des mêmes critères, les candidats d'origine turque en position privilégiée sont : Mustafa Yüksel (Luxembourg), Metin Ozturk (Brabant flamand), Mehmet Sadik Karanfil (Flandre-Orientale), Hacer Düzgün (Limbourg), Muhittin Kilic (Hainaut), Abdullah Demircioglu (Flandre orientale), Ibrahim Tiryaki (Liège), Zülfikar Bilge (Bruxelles) et Coskun Beyazgül (Bruxelles).
Autres. Dans la catégorie " Autres appartenances culturelles ", les mieux placés sont les Pakistanais Sanam Bashir (francophone) et Iqbal Ahmed Qureshi (néerlandophone), et l'Albanais Elhami Shakiri.
Convertis. Enfin, chez les convertis, c'est une élue qui est pressentie : la chiite Isabelle Praile.
Présidence. La championne du scrutin, Hacer Düzgün (avec 3.640 voix), reste candidate présidente. Mais face à d'autres candidats turcs, notamment Coskun Beyazgül (616 voix).
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Une " clientèle " à capter en vue des communales
L'invitation du MR aux associés des mosquées n'a visiblement pas convaincu... Quelques fidèles à peine d'Al-Ansar, à Schaerbeek, et d'El Khalil, à Molenbeek, ont répondu à l'appel du Mouvement réformateur qui souhaitait ouvrir le débat, le 14 avril dernier, avec les citoyens de confession musulmane. Sujet du jour : le processus de reconnaissance officielle des lieux de culte.
L'initiative n'est pas isolée. L'état-major national du CDH a lancé, à son tour, une invitation similaire à la communauté musulmane. La rencontre est annoncée pour la mi-mai. Les observateurs du site minorites.org relèvent, par ailleurs, que le bureau politique du CDH compte désormais un délégué d'origine turque, Halis Kökten, ex-élu communal MR-FDF à Saint-Josse. Sa mission : Centraliser les candidatures turques pour les élections communales de 2006. Je dois trouver des personnes fiables, confie-t-il à minorites.org, capables de mener une politique au niveau du CDH et d'inciter les jeunes à entrer dans le parti.
Autant de démarches qui ont le don d'irriter les musulmans, au moment où la communauté se dote d'instances représentatives officielles.
Nous ne sommes pas dupes de ce genre de racolage, réagit cet élu turc de l'Assemblée générale des musulmans. C'est clairement un investissement en vue des élections communales de 2006.
Même sentiment, pour ce membre d'origine marocaine de l'Exécutif sortant : Le PS souffrant d'un certain discrédit sur le terrain, MR et CDH tentent par tous les moyens de nous enrôler.
Même s'il faut prendre ces chiffres avec distance, étant donné l'échantillon limité de musulmans interrogés, notre sondage sur les pratiques religieuses avançait que les intentions de vote des musulmans donnent 55 % aux socialistes, 15 % aux démocrates chrétiens, 4 % aux libéraux, et 2 % aux écologistes. L'enquête montrait surtout que 28 % des musulmans restent indécis. Assurément une " clientèle " à capter pour des partis en campagne.
"Le Soir" du 27 avril, page 4:
ISLAM
Vent de fronde
A peine installée, l'Assemblée générale (AG) des musulmans de Belgique est critiquée. Sa légitimité est contestée par une majorité des membres de l'AG élue en 1999: "Nous nous considérons comme seule instance représentative valable jusqu'en 2009 puisque nous avons été élus pour 10 ans et sommes constitués en ASBL. Nous attaquerons si nécessaire tout acte posé par la nouvelle AG". Les minorités (convertis et musulmans qui ne sont d'origine ni marocaine ni turque) contestent, eux, les projets de composition de l'Exécutif. Les formules défendues par les Turcs et Marocains laissent 3 ou 4 sièges (sur 17) aux minorités alors qu'elles en avaient 6 dans les Exécutifs installés en 1994, 1998 et 2003. (R.G.)