LINCIDENCE DE LA SITUATION EN ALGERIE SUR LES DEMANDES DE NATURALISATIONS
Jean-Claude LATTAY (Mai 1997)source: Ministère de l'Emploi et de la Solidarité
Les événements graves que connaît l'Algérie depuis quelques années ont provoqué une augmentation forte de demandes de consultation de la part des particuliers résidant en Algérie qui s'est accrue dès le début de l'année 1993; elle est actuellement de l'ordre de 4500 par an (soit près du tiers des consultations émanant des particuliers).
Des personnes originaires d'Algérie s'adressent également à la Sous-Direction des naturalisations afin que celle-ci entreprenne des recherches dont le résultat peut être déterminant quant à leur possession ou non possession de la qualité de Français par filiation -
Il importe pour ces personnes de connaître si elles peuvent se prévaloir du bénéfice du statut civil de droit commun qui a pu être attribué à un de leurs ascendants ou si leurs parents, de statut civil de droit local, ont souscrit une déclaration recognitive de la nationalité française.
En effet, lors de l'indépendance de l'Algérie, le législateur français s'est inspiré de certaines dispositions de la Loi du 28 Juillet 1960 qui ont modifié le Code de la Nationalité française pour tenir compte des accessions à l'indépendance des anciens territoires d'outre-mer d'Afrique Noire et de Madagascar en distinguant les personnes qui ont conservé la nationalité française en étant astreintes à aucune formalité et celles qui, pour établir cette nationalité, devaient souscrire une déclaration de reconnaissance après avoir établi leur résidence en France.
Pour ce faire, la référence a été le statut personnel de chaque personne - ensemble de règles de droit privé régissant cette personne (état civil, mariage, divorce, filiation ...) -: statut civil de droit commun ou statut civil de droit local.
Ainsi, sont restés Français, quelle que soit leur situation au regard de la loi algérienne de nationalité, les Français musulmans originaires d'Algérie qui ont accédé à la qualité de citoyen français par décret (procédure instituée par le Sénatus-Consulte du 14 Juillet 1865) ou par jugement (procédure instituée par la Loi du 4 Février 1919) -procédures étendues à la femme par la Loi du 18 Août 1929 - ou encore qui ont renoncé à leur statut personnel selon une procédure particulière (Art. 82 de la Constitution de 1946 et Art. 74 de la Constitution de 1958).
Pour accéder à ce statut civil de droit commun, qui leur conférait des droits civils et politiques analogues à ceux des Français métropolitains, il fallait que ces personnes soient majeures, célibataires ou monogames, et qu'elles aient adopté un mode de vie se rapprochant de celui des personnes soumises au statut organisé par le Code Civil (cette dernière condition était présumée réalisée pour la personne sachant parler, lire et écrire le français).
Les personnes ne pouvant démontrer que l'un de leurs ascendants a bénéficié d'un tel statut - ce statut se transmettant par filiation - sont censées avoir perdu la nationalité française le 1er Janvier 1963, date d'effet sur la nationalité de l'accession à l'indépendance des départements français d'Algérie (intervenue le 3 Juillet 1962), sauf pour celles d'entre elles dont les parents ont souscrit - jusqu'au 22 Mars 1967 -- la déclaration recognitive de la nationalité française évoquée ci-dessus prévue par l'article 2 de l'Ordonnance du 21 Juillet 1962 - un peu plus de 64 000 déclarations ont été souscrites -.
Malheureusement, il convient de souligner, que les décisions judiciaires accordant le statut civil de droit commun n'ont pas fait l'objet de mesures particulières tendant à leur conservation , certaines d'entre elles ayant vraisemblablement été détruites. Aussi est-il généralement reconnu que la production d'une copie intégrale d'acte de naissance du bénéficiaire où figure en marge la mention du jugement intervenu suffit à apporter la preuve du changement de statut (art. 6 de la Loi du 4 Février 1919).
Par ailleurs, un certain nombre de personnes originaires d'Algérie, bien que de statut civil de droit local, a conservé sans démarche particulière la nationalité française, ces personnes ne s'étant pas vu attribuer la nationalité algérienne par la Loi du 27 Mars 1963: il en était ainsi, des enfants nés en Algérie de parents musulmans étrangers (par exemple de nationalité marocaine), des femmes musulmanes d'origine étrangère ayant acquis la nationalité française par mariage avec un Français de statut musulman après l'entrée en vigueur de la Loi du 17 Février 1942.
Ont également conservé la nationalité française les israélites originaires d'Algérie, qu'ils aient ou non bénéficiés du Décret "Crémieux" du 24 Octobre 1870 leur accordant la citoyenneté française sous réserve de certaines formalités, les personnes d'origine européenne (Italiens, Espagnols, notamment) qui avaient acquis la nationalité française par exemple par le droit du sol (double naissance en Algérie ou naissance et résidence en Algérie) ou encore les enfants issus de mariages "mixtes", c'est-à-dire nés de parents dont l'un était soumis au statut de droit commun (ou de droit européen) et l'autre à un statut particulier.
Aujourd'hui, les Tribunaux d'Instance spécialisés de Marseille, Montpellier et Nimes sont chargés de l'établissement des certificats de nationalité française des personnes résidant en Algérie pouvant y prétendre.
Mais un formalisme contraignant ajouté au contexte actuel ne permet pas de répondre de manière satisfaisante aux demandes. Enfin, il est difficile d'être assuré que tous les courriers parviennent bien à leurs destinataires, nos postes consulaires ayant été conduit, pour des raisons de sécurité, soit à fermer, soit à réduire considérablement le nombre de leurs agents.
Jean-Claude LATTAY.
Sous-direction des naturalisations
Direction de la population et des migrations, janvier 1999
La nationalité française - The French nationality