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Polémique sur l'attitude des imams vis-à-vis des gays aux Pays-Bas (mai-juin 2001)
Presse néerlandaise du 14 mai 2001 - Ambassade de France à La Haye
Les imams néerlandais prônent la discrimination des homosexuels
"Les imams des Pays-Bas sont unanimes à condamner sévèrement l'homosexualité", rapporte le NRC Handelsblad (pp.1 et 3). "Ils la considèrent comme une anomalie qu'on devrait soigner, parce que sa propagation représente un danger pour la société. C'est ce qui ressort d'entretiens que ce journal a eus avec les imams des grandes mosquées des quatre principaux courants islamiques des Pays-Bas. Des propos similaires tenus par l'imam de Rotterdam K. el-Moumni la semaine dernière ont suscité un vif émoi et entraîné l'ouverture d'une instruction judiciaire."
"Le Ministère public ouvre une instruction judiciaire sur les déclarations de l'imam de Rotterdam", écrit le Volkskrant à ce propos, à la une. "A divers endroits des Pays-Bas, des organisations de défense d'intérêts et des particuliers ont porté plainte auprès de la police. "Compte tenu de ces plaintes, le Ministère public va examiner s'il y a lieu de poursuivre l'imam pour diffamation ou discrimination."
"La semaine dernière, Khalil el-Moumni a déclaré durant le programme d'actualités télévisées NOVA que l'homosexualité était une maladie nuisible pour la société", rappelle le journal de centre gauche.
Notons dans ce contexte que la peine maximale encourue pour la discrimination systématique de citoyens en raison de leur race, de leurs convictions ou de leurs préférences sexuelles sera prochainement portée à deux ans de prison, le double de la peine actuelle. Le gouvernement a approuvé un projet de loi du ministre de la Justice, Korthals, allant dans ce sens (de Volkskrant p.3).
source: Ambassade de France aux Pays-Bas - Presse néerlandaise du jeudi 10 mai 2001
Commentaire shaitanesque (14/05/2001)
Nos amis hollandais seraient bien avisés de venir jeter un coup d'oeil en Belgique sur l'affaire de ce prêtre écarté par l'Eglise catholique romaine pour homosexualité, et de lire les textes émis à propos des homos par l'Evêque de Rome, dirigeant suprême de cette église. Ils devraient aussi se pencher sur la discrimination à l'emploi de prêtre (et aux fonctions hiérarchiques plus élevées) envers les femmes dans la même Eglise catholique romaine en Belgique, aux Pays-Bas et dans le reste du monde. Idem d'ailleurs pour les femmes dans les loges maçonniques, dont seules quelques-unes sont mixtes (ou exclusivement féminines). Et il reste aussi la question des enseignants divorcés ou homos dans les écoles confessionnelles catholiques romaines.
Il faut tout de même avoir l'honnêteté de faire la distinction entre l'incitation à la "correction politique" de la part des responsables et élus politiques, ou au minimum à la promotion par ces derniers d'une société ouverte et tolérante envers ses minorités, et la condamnation morale des positions conservatrices d'autorités religieuses. Bien sûr, certains pourraient souhaiter que lesdites autorités religieuses suivent les évolutions sociétales, c'est d'ailleurs le cas de beaucoup d'églises protestantes et des synagogues libérales/réformées, mais il ne faut pas être hypocrites: les trois principales religions monothéistes sont bel et bien fondées sur des textes incontestablement discriminatoires envers les femmes et les homos/lesbiennes/bisexuel-le-s. Et, comme l'argumentent les penseurs juifs orthodoxes contre leurs homologues libéraux/réformistes, si on avait adapté le judaïsme à chaque société, à chaque époque où les Juifs ont vécu, il n'y aurait plus de judaïsme aujourd'hui. Bien sûr, une telle liberté d'expression a pour corollaire une égale liberté pour celles et ceux qui critiquent, parfois virulemment, le caractère réactionnaire et discriminatoire des religions ou de la franc-maçonnerie.
Par contre, la vigilance doit être de mise quand des responsables et élus politiques, comme récemment un député PSC, tiennent des discours virulemment anti-homos, ou, dans un passé plus lointain (mais pas toujours révolu), ils lancent des attaques virulentes à l'encontre des minorités issues de l'immigration, en particulier contre les Musulmans, je pense à des personnalités comme Charles Picqué, actuel ministre fédéral PS, qui a pendant une dizaine d'années diabolisé les communautés musulmanes de Belgique et a été (et reste) un des plus virulents opposants au droit de vote de tous les résidents étrangers.
Idem quand des propos racistes, antisémites, allophobes ou prônant la discrimination, voire pire, envers certaines catégories de la population (ici ou ailleurs) sont tenus par des militants ou responsables associatifs et/ou politiques issus des minorités ethniques, par exemple à l'occasion des émissions en français, en arabe, en turc ou en albanais sur les stations radios FM, ou dans des magazines communautaires, comme récemment dans le magazine du Cercle Ben Gourion (Radio Judaïca). Il serait notamment intéressant de faire traduire les textes des chants nationalistes qui passent dans les émissions albanaises de Radio Panik. Il faudrait aussi sanctionner les propos racistes émis en public, à l'occasion de conférences de presse notamment, par certains politiciens congolais en exil, comme Justine Kasavubu voici quelques semaines*.
Pierre-Yves Lambert
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* ces propos visaient notamment les prétendues origines rwandaises de l'actuel chef de l'Etat congolais, une obsession récurrente de certains politiciens congolais d'opposition
Presse néerlandaise du vendredi 15 juin 2001 - Ambassade de France à La Haye
Le Telegraaf affirme à la une que le ministre Van Boxtel (Intégration, D66) est furieux, après avoir découvert que l'imam El Moumni, dans l'un de ses prêches à Rotterdam, a bel et bien tenu des propos discriminatoires à l'encontre des Européens en général et des homosexuels en particulier.
Presse néerlandaise du vendredi 22 juin 2001 - Ambassade de France à La Haye
Pourquoi l'élite marocaine des Pays-Bas reste-t-elle muette ? Cette question récemment posée par le chroniqueur Bas Heijne dans le NRC, à propos de l'affaire El-Moumni, a incité Vrij Nederland à faire le tour des Marocains qui ont réussi dans la société néerlandaise. Pourquoi ne se sont-ils pas encore mêlés au débat sur les déclarations de l'imam de Rotterdam et sur la violence des jeunes Marocains ? "Pourquoi le ferions-nous ?" est la réaction générale. "Pourquoi dois-je réagir sur commande ?" s'interroge par exemple le journaliste Moustapha Oukbih. "Pourquoi dois-je parler d'El Moumni ? Je ne ressens aucune affinité avec cet homme." Naïna Azough, active dans la fondation Rotterdam Capitale culturelle européenne 2001, considère la réaction des Néerlandais autochtones comme une forme de paternalisme libéral de gauche : d'abord on étreint les allochtones jusqu'à presque les étouffer, ensuite on leur demande de rendre des comptes concernant le comportement de gens avec qui ils n'ont aucun lien. C'est un grand malentendu : on ne peut pas parler de communauté marocaine des Pays-Bas, et un imam parle tout au plus au nom d'un petit groupe de vieux.
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