[L'accès des communautés d'origine immigrée à des médias audiovisuels spécifiques]
Pierre-Yves LAMBERT(bulletin de la Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes 15/9/90)
Depuis quelques semaines, on assiste à une campagne particulièrement virulente contre la "Fréquence arabe" (106.8 en FM), accusée par certains d'être "radio-jihad" ou "la voix de la non-intégration"...
La Fédération Bruxelloise des Jeunes Socialistes ne s'est pas encore prononcée publiquement sur la question, car le problème de la place dans les médias pour les communautés d'origine immigrée est beaucoup plus vaste et beaucoup plus complexe que celui qui est soulevé en ce moment par certains politiciens mal informés ou mal intentionnés.
C'est pour cette raison qu'une commission "Immigration" (...) se réunira le mardi 2 octobre (...).
D'ores et déjà, quelques réflexions personnelles pourront peut-être lancer le débat...
1) On ne parle aujourd'hui que d'une fréquence arabe à Bruxelles: pourquoi n'a-t-on pas attribué, lors du partage de la bande FM, des fréquences aux autres communautés (espagnole, italienne, grecque, turque, portugaise, etc.) ? Qui a pris cette décision ? N'y avait-il pas, en outre, d'autres radios s'adressant aux communautés maghrébines qui ont disparu lors de ce partage ? Pourquoi a-t-on émietté cette "fréquence arabe" (qui compte actuellement 5 radios: Avenir-Al Mustaqbal, Al Watan, Midi 1, Médi Inter, La Voix de l'Islam) ?
2) Quelle est la politique médiatique des pouvoirs publics à l'égard des communautés d'origine immigrée dans l'audiovisuel public (RTBF) ? Pourquoi a-tr-on supprimé Ciao Amici, l'émission italienne d'Interwallonie à la télévision, en janvier dernier ? Pourquoi, dans la nouvelle grille de proggrammes de cette rentrée, les émissions d'Interwallonie ont-elles été reléguées à 9h50 le samedi matin, créneau horaire plutôt dissuasif ? Quand y aura-t-il des émissions religieuses pour les musulmans et les chrétiens orthodoxes à la RTBF, comme il y en a pour les autres communautés religieuses reconnues ?
3) Pourquoi ne capte-t-on via la télédistribution que RAIUNO, la voix de la démocratie-chrétienne, et pas RAIDUE et RAITRE, représentant des courants politiques probablement plus répandus dans la communauté italienne de Belgique ?
4) Quelle sera l'attitude du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel de la Communauté française à l'égard de la chaîne privée de télévision marocaine qui a demandé son admission sur les réseaux de télédistribution, sachant que cette chaîne est totalement inféodée au régime despotique en place dans ce pays ?
L'autre coup de gueule de Charles PICQUE
Pierre-Yves LAMBERT (envoyé au Soir en novembre 1992; non publié)
Dans sa lettre adressée à Bernard ANSELME à propos des radios de la Fréquence arabe (cf. communiqué de presse du 23/10/1992), Charles PICQUE se plaint de ce que les émissions diffusées par celles-ci ne répondent pas à "la volonté de l'exécutif bruxellois (...)".
S'agissant de radios libres, et d'une problématique n'entrant pas dans le champ actuel des compétences régionales, on peut légitimement s'interroger sur la conception qu'a le ministre-président du principe de liberté de la presse et du respect du partage des compétences entre régions et communautés dans ce pays.
Si cette dernière question trouve en partie sa réponse dans la récente interview de l'intéressé au Soir, sa lettre à son homologue de la Communauté française définit le rôle dans lequel il entend confiner les médias dans "sa" région. Outre "répondre à la volonté de l'exécutif", ceux-ci doivent apporter des "éléments aux attentes de parents inquiets de voir leurs enfants confrontés à la drogue, à la violence urbaine, au décrochage scolaire"...
Voilà une conception fort étrange du rôle d'une radio vis-à-vis de ses auditeurs et des pouvoirs publics. Mais, après tout, Monsieur PICQUE pourrait, s'il en avait l'envie, introduire une demande auprès de son collègue ANSELME afin qu'il lui soit attribué une fréquence où il pourrait diffuser divers programmes plus aptes à le satisfaire, comme l'a déjà fait son homologue français Jacques CHIRAC. Il aurait ainsi tout loisir de fustiger "l'appétit flamand et l'indifférence wallonne" et de promouvoir le nouveau parti politique dont il appelle la formation de ses voeux.
Quant à l'"expertise", appelée à plusieurs reprises en renfort des exigences du ministre-président, on ne voit pas très bien de laquelle il s'agit. En effet, depuis 1987, divers rapports "scientifiques" ont été commandés par certains services de la Communauté française à des groupes ou à des personnes qui manifestaient explicitement, dans leurs conclusions, leur volonté de remplacer eux-mêmes les radios existantes de la Fréquence arabe. On peut par conséquent légitimement s'interroger sur la fiabilité et la sincérité de pareils "experts", ainsi que sur les motivations des fonctionnaires qui les ont aidés à obtenir des subsides plantureux.
L'objectif de Monsieur PICQUE, confirmé par la référence à ces "expertises", peut s'expliquer quand on sait que les auteurs de ces rapports, grâce à une procédure électorale pour le moins douteuse, sont parvenus à leurs fins en mars dernier en s'assurant la quasi totalité des sièges au conseil d'administration de la "Radio de la Communauté Maghrébine", patronnée par certains services de la Communauté française. La lettre qui vient d'être adressée à Bernard ANSELME semble donc bien constituer une marque de soutien explicite au projet de R.C.M., au détriment de celui présenté par Al Manar (Le Phare), qui regroupe des responsables de quatre radios actuelles sur six, la radio du centre Islamique du Cinquantenaire étant quant à elle représentée au conseil d'administration de... R.C.M. ! Mais les "informateurs" et "experts" du ministre-président ont peut-être omis, par prudence, de le lui signaler.
Au-delà de la polémique suscitée par cette lettre de "recommandation", il y a lieu de replacer la question de la Fréquence arabe dans un contexte un peu plus global et de relativiser son rôle réel et supposé en faveur ou au détriment de l'"intégration".
Tout d'abord, rappelons qu'il est tout à fait possible de capter, avec un simple poste de radio, des stations émettant en ondes courtes depuis les capitales arabes, ou autres, tant Rabat, Alger et Tunis que Le Caire ou Bagdad. A moins d'installer un dispositif de brouillage des ondes au sommet de la maison communale de Saint-Gilles, on voit mal comment empêcher les gens d'écouter ces stations, au cas où ils ne seraient plus satisfaits par la fréquence modulée.
Ensuite, on ne peut tout de même pas ignorer que, en cette fin de vingtième siècle, la télévision a considérablement pris le pas sur la radio en termes d'audience et d'influence. Or, le progrès de technique et l'abaissement des coûts d'installation ont provoqué depuis quelques temps un engouement certain pour les antennes paraboliques, grâce auxquelles on peut notamment capter des stations comme MBC, contrôlée par l'Arabie Séoudite. Là aussi, les pouvoirs publics sont impuissants, leur contrôle en la matière étant limité aux chaînes diffusées par le câble.
Enfin, pendant combien de temps va-t-on encore présenter les Bruxellois d'origine arabe comme une communauté influençable et manipulable par des radios, des ambassades ou des mosquées, alors que plus des trois quarts d'entre eux sont présents en Belgique depuis plus de vingt ans ou y sont nés. L'influence du milieu de travail et des enseignants ne peut être constamment sous-estimée dans ce contexte, ni même celle des syndicats ou des partis politiques.
A cet égard, on peut rappeler que Monsieur PICQUE s'est abstenu de soutenir, il y a un peu plus d'un an, l'initiative des Jeunes Socialistes visant à promouvoir l'intégration des progressistes d'origine étrangère au sein des sections bruxelloises du Parti Socialiste. Bien plus, une quinzaine au moins de jeunes d'origine maghrébine ont vu, en 1990 et 1991, leurs demandes d'adhésion au PS de Saint-Gilles rejetées sans appel et sans avoir été entendus préalablement. Le président de cette section n'est autre que... Charles PICQUE lui-même.
Taxes sur les antennes paraboliques et offre sur le câble
Pierre-Yves LAMBERT (paru dans Nouvelle Tribune, octobre 1997)
Les minorités: nouvelle source de revenus pour les télédistributeurs
La société privée de télédistribution Radio Public, qui dessert environ cent mille abonnés dans sept communes bruxelloises, a mis en place un système de "bouquets de chaînes" qui permet notamment aux abonnés de capter, moyennant un supplément mensuel de 195 francs, les bouquets "TVD Arabesque", composé de la télévision d'Etat marocaine RTM et de la station londonienne à capitaux séoudiens MBC, et/ou "TVD Turquoise", soit la télévision d'état turque TRT et la station privée Euro Show. Rappelons que la concurrente de Radio Public, Coditel, offre à ses abonnés des les six communes bruxelloises qu'elle dessert, dans le forfait de base, les stations d'état portugaise, marocaine et turque (toutes en mode "hyperbande", non disponible sur les anciens téléviseurs).
On peut se demander pourquoi il faudrait payer un supplément pour voir des stations arabes ou turques alors que 36 autres chaînes, la plupart en provenance d'états membres de l'Union Européenne, sont accessibles dans le forfait de base.
Le Ministre fédéral (Bruxelles est une région bilingue et dépend donc du fédéral sur ce plan) compétent, le socialiste Yvan YLIEFF, s'est fendu, plusieurs semaines après le début de la diffusion de ces bouquets, d'un communiqué de presse menaçant, enjoignant TVD-Radio Public de cesser immédiatement cette diffusion, au nom de la loi du 30 mars 1995 qui conditionne l'accès de nouvelles chaînes sur le câble à une autorisation ministérielle. CODITEL diffusait pourtant déjà deux de ces chaînes (TRT et RTM) depuis plusieurs mois dans six autres communes bruxelloises... TVD-Radio Public a immédiatement réagi en invoquant la directive européenne "télévision sans frontières" et la récente condamnation de l'état belge sur base de celle-ci, en septembre dernier.
Il ressort d'un entretien téléphonique que nous avons eu avec un haut responsable de CODITEL que les câblo-opérateurs s'estiment lésés par la concurrence sauvage du satellite, par le fait qu'ils doivent payer des droits d'auteurs astronomiques (par foyer câblé) pour chaque chaîne diffusée sur leurs réseaux alors que les heureux possesseurs de paraboles ne paient que l'antenne et son installation. Par ailleurs, l'éventualité de contrôles de l'inspection des finances sur les fichiers d'abonnés au câble incite fortement ceux-ci à s'acquitter de la coûteuse redevance radio-télé, alors que les accros au satellite échappent à cette taxe faute de moyen de vérification. L'instauration de taxes communales sur les paraboles représente donc en quelque sorte un rétablissement de l'équité dans la concurrence entre câble et satellite, ce d'autant plus que, on l'oublie parfois, les administrations communales seront forcées de communiquer les coordonnées des détenteurs de paraboles au service fédéral de la redevance radio-télé.
En ce qui concerne les aspects techniques, il ne serait pas possible, toujours d'après ce responsable de CODITEL, d'ajouter un très grand nombre de chaînes à celles actuellement diffusées. Par ailleurs, il nous a déclaré que la fin des situations de monopole dont bénéficient actuellement les câblo-opérateurs, une mesure de dérégulation imposée par l'Europe, n'aura probablement que peu d'effets en Belgique.
Bernard PHILIPPE, président du Conseil d'Administration de l'asbl Wolu-TV, câblo-opérateur de Woluwe-Saint-Lambert, nous a quant à lui précisé que, "sauf erreur de notre part, les arrêtés d'exécution de cette loi [du 30 mars 1995] n'ont pas encore été pris tant pour les programmes étrangers européens que pour les programmes étrangers extra-européens". Il nous a également rappelé la condamnation de la Belgique par la Cour de Justice des Communautés Européennes, par son arrêt du 10 septembre 1996, sur base de la Directive "Télévision sans frontières"... Enfin, il nous a annoncé que "la distribution de nouveaux programmes étrangers (la Grèce entre autres) est à l'étude".
Eukarhsto !
Par contre, à l'occasion d'un colloque sur le droit de vote des étrangers organisé à Charleroi en mai 1997, le président wallon de l'intercommunale de télédistribution, le député fédéral PS Patrick MORIAU, a été interpellé par plusieurs citoyens à propos du refus de ce câblo-opérateur public de diffuser des chaînes arabes ou turques, alors que par exemple la commune de Charleroi a introduit une taxe de... dix mille francs sur les antennes paraboliques ! Réponse du président MORIAU: "Tant la taxe sur les paraboles que la non diffusion de chaînes arabes ou turques sont destinées à protéger les téléspectateurs contre l'intégrisme"...
Programmes "made in Belgium" - Existe-t-il une alternative au recours à des chaînes étrangères ?
A Montréal, les câblo-opérateurs, pour attirer la clientèle "ethnique", ont réservé un canal que se partagent, par tranches horaires, les différentes minorités ethnoculturelles, des Ukrainiens aux Libanais, en passant par les Italiens et les Haïtiens. La qualité des programmes est assez bonne, mais le public-cible est uniquement allophone, ce qui correspond à la version canadienne du multiculturalisme. En clair, les émissions ne sont pas compréhensibles par le public francophone ou anglophone. Certaines émissions sont abondamment lardées de publicité commerciale, pour le coiffeur arménien du coin comme pour la banque canadienne qui propose ses services à la population hispanophone.
En Belgique, depuis la disparition d'Interwallonie, il ne subsiste qu'une émission interculturelle en français, Sindbad, présentée par Khiti BENHACHEM sur les ondes de la RTBF, avec retransmission sur Télé 21 et sur TV5 Europe. L'émission équivalente de la BRTN a disparu il y a un an déjà. Il est toutefois possible aux câblés de se brancher sur la télévision néerlandaise qui possède une émission en turc et en arabe, sous-titrée en néerlandais (et en turc ou en arabe quand une personne s'exprime en néerlandais). Selon nos informations, cette émission, d'une grande qualité tant pour la forme que pour le contenu, est assidument regardée en Belgique.
Respect de l'urbanisme ou droits culturels des minorités: une opposition artificielle
Un règlement communal a été proposé en juin 1995 à la Ville de Bruxelles par l'échevin de l'Urbanisme, Henri SIMONS (Ecolo). Dans un communiqué diffusé à la presse à l'époque, il était précisé que "le câble à Bruxelles devrait s'ouvrir aux télévisions d'ailleurs, européennes et extra-européennes.(...) Le câble n'est toutefois par encore ouvert à ces autres télévisions et l'antenne parabolique permet aujourd'hui à certains groupes d'habitants de la Ville d'avoir accès aux émissions de leur culture. Il ne peut donc être question d'interdire de manière générale les antennes paraboliques.
Le règlement que le Collège soumettra au Conseil prochain concilie à notre sens cette réelle exigence culturelle avec celles du bon aménagement des lieux, en particulier du point de vue de l'esthétique. En effet, si l'installation d'antenne parabolique est interdite de manière générale en façade ou toiture avant, elle est, par contre, autorisée en façade ou toiture arrière, pour autant que certaines conditions souples soient remplies (l'antenne ne peut être apparente depuis tout espace accessible au public; elle ne peut engendrer de troubles anormaux du voisinage...).
De même, afin de garantir à tout un chacun l'accès aux émissions de sa propre culture, une antenne est autorisée par appartement, et non par immeuble, dans les immeubles à appartements multiples. Le règlement ici commenté ne concerne que l'aspect urbanistique de la question, car là était notre première et unique préoccupation. Ni la question de la taxation éventuelle, ni celle de la détermination du contenu des émissions ne sont ici abordées, dès lors que ces matières ne relèvent pas de la compétence de la Ville et qu'il a été jugé inopportun de les aborder."
La Ville de Namur a adopté en avril 1996 un règlement communal instituant une taxe annuelle de 5.000 francs sur "les antennes extérieures, paraboliques ou autres". Le groupe Ecolo a proposé quatre amendements à ce règlement, entre autres l'exonération des "redevables issus de communautés culturelles n'ayant pas accès, par le câble, à une chaîne propre à leur culture". Cet amendement a été rejeté. Interpellé lors des Assises de l'Intégration en Province de Namur, l'échevin responsable a déclaré que la Ville s'est engagée à demander à la société de télédistribution d'élargir le bouquet de chaînes proposé aux téléspectateurs, afin de rencontrer cette demande spécifique.
Début janvier 1995 déjà, Ecolo avait dénoncé par voie de presse l'interdiction des antennes paraboliques édictée par le Conseil d'administration du Foyer Namurois dans les logements sociaux: "De facto, cette mesure interdit aux communautés turques et maghrébines (largement utilisatrices de ce genre d'antenne) l'accès aux liens culturels essentiels avec leur pays d'origine. Cet interdit contrevient à l'article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (1948) qui exprime que "tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit."
A Schaerbeek, un règlement du même type est entré en vigueur en 1996, avec le soutien d'Ecolo (qui fait partie de la majorité). Les possesseurs d'antennes doivent donc s'acquitter de la taxe communale, de la taxe sur la radio-télévision et, s'ils y sont raccordés, de l'abonnement au câble, alors qu'aucune chaîne arabe, turque, grecque ou albanaise n'y est offerte dans le forfait de base.
A Saint-Josse-ten-Noode, la réglementation ne prévoit qu'un paiement unique de 2.450 francs (ou 5.450 francs si une enquête publique s'avère nécessaire), lié aux frais de dossier en vue d'une demande de permis d'urbanisme. Les antennes ne sont en aucun cas autorisées en façade. Il n'est pas prévu d'introduire une taxe annuelle. La société de logements sociaux de cette commune, les Habitations à Bon Marché (PS-PSC-PRL-SP) a quant à elle interdit les antennes individuelles, mais n'a pas encore fait le nécessaire pour la pose d'antennes collectives.
Plusieurs autres sociétés de logements sociaux ont interdit à leurs locataires de poser des antennes paraboliques, à Namur et à Tubize notamment. Certaines ont néanmoins proposé comme mesure alternative l'installation d'antennes collectives par immeuble, mais cela pose apparemment le problème du monopole des câblo-opérateurs, et ces mesures n'ont jamais été mises en oeuvre. Pire, à Tubize, la société locale a envoyé des préavis à des locataires maghrébins qui, horresco referens, avaient installé une antenne parabolique sur leur terrasse !
Les médias à destination des personnes originaires de pays musulmans résidant en Belgique
Pierre-Yves LAMBERT (rapport pour Muslim Voices, paru en français dans Maghreb Observateur, avril 98)
1. Maghrébins
Il y a en Belgique au moins 210.000 personnes d'origine maghrébine, pour la plupart originaires du Maroc. Parmi les personnes arrivées en Belgique à l'âge adulte comme travailleurs immigrés, on estime généralement qu'une part importante était analphabète tant en arabe qu'en français (les langues berbères étant parlées, mais non écrites). Un nombre indéterminé d'anciens étudiants étrangers, de réfugiés et de personnes arrivées plus récemment par regroupement familial sont alphabétisées tant en arabe qu'en français. A de rares exceptions près, les personnes scolarisées en Belgique ne connaissent, outre le français et/ou le néerlandais, que l'arabe dialectal (d'usage oral) et/ou une langue berbère.
1.1. Médias écrits
Plusieurs quotidiens et hebdomadaires en arabe, et dans une moindre mesure en français, s'adressant aux personnes originaires du Monde arabe, sont diffusés dans les librairies belges. Aucun n'est réalisé en Belgique, et il n'existe pas de supplément ou de rubrique s'adressant spécifiquement aux populations maghrébines de Belgique. Certains de ces médias disposent par ailleurs de sites web, mais nous ne disposons pas de données quant à leur fréquentation par des internautes basés en Belgique. Il existe quelques librairies qui vendent des livers en arabe, ainsi qu'au moins une bibliothèque, à Bruxelles.
Trois magazines francophones ont été réalisés en Belgique par des personnes d'origine maghrébine dans les années quatre-vingts et quatre-vingt-dix, mais leur diffusion a toujours été assez restreinte : Tribune Immigrée/Nouvelle Tribune (1981-), Spots/Al Adwaa/Horizons Magazines (1988-) et Reflets Magazine (1992-1993). Depuis 1996, un magazine maghrébin international en français (Maghreb Observateur), basé à Montréal avec des collaborateurs en Belgique, aux Pays-Bas et en France, est vendu en librairie au Canada, mais le projet de diffusion en Belgique n'a pas été concrétisé à ce jour.
Certaines organisations ou associations maghrébines ont, généralement pendant des périodes assez brèves, réalisé des bulletins périodiques à usage interne, la plupart du temps en français ou en néerlandais, dont quelques numéros ont parfois été diffusés plus largement. Seuls deux mémoires d'étudiants en journalisme (BERROUHO 1988 et VANDECASSERIE 1993) ont décrit plusieurs de ces bulletins, ainsi que les trois magazines cités plus haut.
1.2. Médias radiodiffusés
En région bruxelloise, où vivent la moitié des Maghrébins de Belgique, de nombreuses radios libres ont vu le jour au début des années 80. Certaines avaient été créées par des Maghrébins, d'autres avaient une ou des émissions en arabe. En 1986, lors de la légalisation de ces radios, le ministère de la communauté française de Belgique décida de n'octroyer qu'une seule fréquence modulée aux diverses radios arabes, qui devaient donc se partager les temps d'antenne. Depuis 1992, trois de ces radios (El Wafa, Médi Inter et Culture 3) ont mis en commun leurs plages horaires, leur matériel et leurs régies publicitaires sous le nom de "Radio Al Manar". Trois autres (Médi 1, El Watan et As-Salaam) poursuivent une existence indépendante sur la même fréquence.
De nombreux conflits ont éclaté, tant au sein de chaque radio qu'entre radios, et entre radios existantes et groupes souhaitant s'en emparer avec le soutien de certains politiciens belges francophones. A plusieurs reprises, notamment dans des contextes de crises internationales mettant en cause des pays arabes (bombardement de la Libye par les Etats-Unis en 1986; invasion du Koweït et guerre du Golfe en 1990-1991), des accusations de propagande anti-occidentale furent lancées à l'encontre de cette "fréquence arabe" et des rapports très négatifs adressés aux autorités belges par des Maghrébins désireux d'offrir une alternative unique aux radios existantes (DETANT 1991, LORET 1992, SAIDI 1997).
Le noyau des groupes qui ont tenté de s'emparer de ces radios est sensiblement resté le même au fil des ans : des ex-étudiants maghrébins arrivés en Belgique à l'âge adulte pour y effectuer des études universitaires, occupant des emplois dans le secteur public ou associatif subventionné. Plusieurs responsables des radios actuelles sont quant à eux des immigrés de la première génération, petits entrepreneurs dans l'"ethnic business".
La qualité des émissions produites par ces radios est assez inégale. Il faut néanmoins tenir compte du fait qu'elles ne reçoivent aucune subvention publique et que leurs animateurs sont bénévoles et n'ont pas de formation appropriée. Il y a des émissions en français, en arabe dialectal et dans deux langues berbères du Maroc (rifain et chelha).
Des émissions en arabe ont par ailleurs été diffusées sur les radios belges de service public, tant francophone que néerlandophone, mais la dernière a été supprimée en novembre 1997. Au moins deux radios associatives bruxelloises en diffusent encore actuellement.
1.3. Médias télédiffusés
Alors que la plupart des foyers belges sont raccordés au réseau câblé de télédistribution depuis une vingtaine d'années, l'offre télévisuelle disponible sur ces réseaux a, jusqu'il y a peu, totalement ignoré le public originaire du Maghreb. La Radio Télévision Marocaine n'est diffusée par câble que dans quelques communes bruxelloises depuis 1996, de même que la chaîne londonienne MBC. Néanmoins, un grand nombre de foyers maghrébins sont dotés d'une antenne parabolique qui permet de capter les nombreuses stations arabophones diffusées par satellite. Il n'y a plus d'émissions en arabe sur les télévisions belges de service public et il n'y a pas d'autres programmes télévisés en arabe ou dans une langue berbère produits à l'intention des Maghrébins de Belgique.
2. Personnes originaires de Turquie et des Balkans
Il y a en Belgique au moins 105.000 originaires de Turquie, en ce compris au moins une dizaine de milliers de Kurdes et quelques milliers de chrétiens, surtout assyriens et arméniens. Les Musulmans de langue serbo-croate, en provenance de Bosnie principalement, sont quelques milliers, dont une grande partie sont arrivés suite à la guerre civile sous le statut de personnes déplacées. Les Albanais originaires du Kosovo et de Macédoine sont probablement plus nombreux, mais il n'existe aucune statistique fiable les concernant.
2.1. Médias écrits
Les locuteurs du turc, de l'albanais et du serbo-croate sont pour la plupart capables de lire la presse, voire des livres, dans une de ces langues. La presse dans ces langues est facilement accessible dans de nombreuses librairies de quartier, mais il n'y a dans toute la Belgique qu'une ou deux librairies généralistes turques vendant des livres, sans compter les bibliothèques dans les mosquées et centres culturels turcs. Il n'existe aucune publication réalisée en Belgique à l'intention de la communauté turque, à l'exception de bulletins associatifs à usage interne.
2.2. Médias radio- et télédiffusés
Contrairement à ce qui se passe à Berlin par exemple (GASEROW 1995), il n'existe pas de programme privé de télévision en turc produit et diffusé à l'intention du public turcophone de Belgique. Il n'y a plus d'émissions en turc ni en serbo-croate sur les radios et télévisions de service public francophones et néerlandophones. Il n'y en a jamais eu en albanais. Une radio associative bruxelloise multiculturelle diffuse deux émissions en albanais, l'émission turque ayant disparu il y a peu, faute d'animateur.
Certains réseaux de télédistribution par câble proposent la chaîne d'Etat turque TRT-Avrasya ("Eurasie") à leurs abonnés, dans certaines villes de Flandre depuis 1990 et à Bruxelles depuis 1996. Un réseau câblé bruxellois propose également la chaîne privée turque Euroshow, notamment dans la commune bruxelloise de Schaerbeek, où vivent plusieurs milliers de Turcs. Plusieurs autres stations turcophones, publiques ou privées, sont accessibles via le satellite aux très nombreux possesseurs d'antennes paraboliques, ce qui rend l'abonnement au réseau câblé peu attractif. Il existe une station de télévision albanaise (émettant depuis Tirana) qui diffuse quelques heures par jour via le satellite, mais il n'est pas prévu de la diffuser sur le câble.
Med-TV, une station de télévision réputée proche du parti kurde PKK (qui mène une lutte armée contre l'Etat turc depuis 1984) émet depuis 1995 en kurde, en turc, en assyrien, en arabe et en anglais depuis la ville flamande de Denderleeuw, bien que son siège soit situé à Londres. Il s'agit donc d'une station à vocation internationale uniquement captable par satellite, qui n'est pas diffusée sur le câble en Belgique.
3. Les médias à caractère religieux
Contrairement à d'autres cultes reconnus par l'Etat belge, la communauté musulmane ne dispose pas d'émissions spécifiques sur les chaînes publiques de radio et de télévision. De telles émissions produites par des chaînes publiques de pays voisins (Pays-Bas et France) sont néanmoins accessibles en télévision (via le câble) et en radio aux Musulmans de Belgique, y compris en arabe et en turc.
Deux bulletins diffusés par abonnement et dans les librairies islamiques, Islamitiesche Nieuwsbrief et Le Conseil, paraissent selon une périodicité très irrégulière. Leurs équipes rédactionnelles incluent plusieurs Belges convertis à l'Islam. Divers supports médiatiques (revues, brochures, livres, cassettes audio, tracts) sont également diffusés par les courants islamistes radicaux, quoique rarement produits en Belgique (GRIGNARD 1997).
4. La réglementation concernant le câble et les antennes paraboliques
En Belgique, les autorisations de diffusion de stations de radio et de télévision dépendent des Communautés (flamande, francophone et germanophone), sauf en région bruxelloise (bilingue) où elles restent une compétence de l'Etat fédéral. Dans la pratique, la quasi totalité des foyers belges étant raccordés à des réseaux câblés de télédistribution, les demandes d'autorisation de nouvelles chaînes sont faites par les câblo-opérateurs privés ou intercommunaux. En région bruxelloise, deux câblo-opérateurs privés ont commencé, en 1996, à diffuser des stations arabes (RTM et MBC) et turques (TRT et Euroshow) sans autorisation préalable, ce qui a provoqué une polémique avec le ministre compétent, mais la diffusion n'a pas été interrompue pour autant. La directive européenne Télévision sans frontières est d'application en Belgique, ce qui a entraîné en 1996 la condamnation de l'Etat belge par la Cour européenne de Justice pour le décret adopté en matière d'autorisation de diffusion par la Communauté flamande.
Par ailleurs, plusieurs communes ont imposé des taxes annuelles sur les antennes paraboliques en les motivant la plupart du temps par des problèmes d'ordre urbanistique ou budgétaire. Contrairement à ce qui s'est passé en France en 1995, les arguments politico-culturels à l'encontre de la réception de chaînes de télévision en provenance de pays musulmans, notamment la crainte de propagande intégriste et/ou anti-occidentale, n'ont que très rarement été évoqués par des responsables politiques belges (LAMBERT 1997).
BIBLIOGRAPHIE
(étant donné leur accès difficile, les mémoires d'étudiants n'ont pas été repris ici)
1. Médias écrits
Alain GRIGNARD, "L'Islam radical en Belgique à travers la littérature de propagande: une introduction", in: F.DASSETTO (ed.), Facettes de l'Islam belge, Bruxelles, 1997, Academia-Bruylant, pp.167-178
Frédéric VANDECASSERIE, "Médias et immigration en Belgique", in: Migrance (Paris) n°11-12, 1996
2. Médias radiodiffusés
Hassiba BENBOUALI, "La Fréquence arabe", in: Agenda interculturel, n°127, octobre 1994
Frédérique BOURAS, "La Fréquence arabe", in: Tribune Immigrée, n°20, octobre 1986
Thérèse MANGOT, "Communauté française face aux radios communautaires", Agenda interculturel, n°110-11, janvier-février 1993 (numéro spécial sur les médias)
3. Médias télédiffusés
Claire FRACHON et Marion VARGAFTIG, Télévisions d'Europe et immigration, Paris, Institut national de l'Audiovisuel et Association Dialogue Entre les Cultures (diffusion La Documentation française), 1993
Pierre-Yves LAMBERT, "Taxe sur les antennes paraboliques et offre sur le câble", Nouvelle Tribune, octobre 1997
4. Sujets connexes
Stefano ALLIEVI, Albert BASTENIER, Alain BATTEGAY et Ahmed BOUBEKER, Médias et minorités ethniques. Le cas de la guerre du Golfe, Louvain-la-Neuve, Academia Bruylant - SYBIDI, 1992
Association Générale des Journalistes professionnels de Belgique, Recommandations pour l'information relative aux allochtones, Bruxelles, 1994 (existe également en néerlandais)
Albert BASTENIER, Felice DASSETTO, Médias U Akbar. Confrontations autour d'une manifestation, Louvain-la-Neuve, CIACO, 1987
Thérèse MANGOT, "Insertion sociale et expression culturelle. La politique de la Communauté française", in: Marie-Thérèse COENEN et Rosine LEWIN (eds.), La Belgique et ses immigrés. Les politiques manquées, Bruxelles, De Boeck Université, 1997, pp. 189-202
Dogan ÖZGÜDEN, Immigration turque et mass média, Bruxelles, Info Türk, 1983
Martine VANDEMEULEBROUCKE, "Sous le regard des médias", in: Marie-Thérèse COENEN et Rosine LEWIN (eds.), La Belgique et ses immigrés. Les politiques manquées, Bruxelles, De Boeck Université, 1997, pp.203-220
Magazines ethniques, "interculturels" et/ou "multiculturels"
Agenda Interculturel (depuis 1981), c/o Centre bruxellois d'Action Interculturelle, 24 rue de Stalingrad, 1000 Bruxelles, phone +32.2.513.96.02, fax +32.2.512.17.96 (en français; à destination principalement des travailleurs associatifs en milieu "interculturel")(e-mail cbai@skynet.be )
Al Akhbar (depuis 1996), c/o Federatie Marokkaanse Demokratische Organisaties (Fédération des organisations démocratiques marocaines), Bondgenotenstraat 52, 1190 Brussel (Vorst), phone +32.2.346.17.71, fax +32.2.343.78.83 (principalement en néerlandais; à destination des militants associatifs marocains de Flandre et de Bruxelles)(e-mail fmdo@skynet.be )
Bareel (depuis 1979), c/o Vlaams Centrum Integratie
Migranten (Centre flamand pour l'intégration des immigrés),
Gaucheretstraat 164, 1030 Brussel (Schaarbeek), phone +32.2.201.03.00, fax
+32.2.201.03.39 (en néerlandais, à destination
principalement des travailleurs associatifs en milieu "interculturel")
[n'existe plus]
çagdas (depuis 1996), c/o Federatie van Vooruitstrevende Turkse Verenigingen (Fédération des associations progressistes turques), Dendermondsesteenweg 319, 9040 Gent, phone +32.2.228.90.55, fax +32.2.228.90.55 (en néerlandais)
Espace Orient, [n'existe plus] (traductions en français d'articles de la presse arabe, turque et iranienne)(site http://www.medeatrade.com/fr/press/eo/ e-mail tanju.goban@skynet.be
Het Huis van Palmyra (depuis 1995), c/o Intercultureel Centrum voor Migranten (Centre interculturel pour les immigrés), Gallaitstraat 78, 1030 Brussel (Schaarbeek), phone +32.2.245.88.30, fax +32.2.245.58.32 (en néerlandais)
Horizons Magazine (parution irrégulière depuis 1988, dernier numéro début 1999), 27 Place communale, 1080 Bruxelles (Molenbeek), phone +32.2.411.67.85, fax +32.2.411.42.19 (en français; à destination principalement de la communauté d'origine marocaine)(site www.horizons-magazine.be )
Nouvelle Tribune (depuis 1981), c/o I.D.I. , phone +32.2.502.28.38, fax +32.2.502.34.84 (en français) nouvelle.tribune@yucom.be
Osmoses (depuis 1996), 43 rue Dieudonné François, 7100 Trivières, phone +32.64.26.01.77, fax +32.64.26.52.53 (en français; à destination des travailleurs associatifs et institutionnels de Wallonie en milieu "interculturel") cacri@skynet.be
BIBLIOGRAPHIE EXTENSIVE (y compris mémoires détudiants à lU.L.B.)
1. Médias écrits
Assia BERROUHO, Panorama de la presse immigrée maghrébine (entre autre le cas de Tribune Immigrée), Bruxelles, ULB (mémoire T11612), 1988
Alain GRIGNARD, "L'Islam radical en Belgique à travers la littérature de propagande: une introduction", in: F.DASSETTO (ed.), Facettes de l'Islam belge, Bruxelles, 1997, Academia-Bruylant, pp.167-178
Frédéric VANDECASSERIE, Panorama de la presse francophone à l'usage des immigrés en Belgique. En ce compris le cas de l'Agenda Interculturel., Bruxelles, ULB (mémoire T16884), 1993
id., "Médias et immigration en Belgique", in: Migrance (Paris) n°11-12, 1996
2. Médias radiodiffusés
Hassiba BENBOUALI, "La Fréquence arabe", in: Agenda interculturel, n°127, octobre 1994
Frédérique BOURAS, "La Fréquence arabe", in: Tribune Immigrée, n°20, octobre 1986
Anja DETANT, Een onderzoek naar de rol van de media bij de integratie van migranten. Case study: de Arabische frequentie in Brussel, Bruxelles, VUB (mémoire), 1991
Philippe LORET, L'intégration par la voix des ondes. Radio El Wafa au sein de la Fréquence arabe, Bruxelles, ULB (mémoire), 1992
Thérèse MANGOT, "Communauté française face aux radios communautaires", Agenda interculturel, n°110-11, janvier-février 1993 (numéro spécial sur les médias)
3. Médias télédiffusés
J. BAUWENS, 'Televisiekijken en culturele identiteit: op zoek naar verschillen en overeenkomsten in een cross-culturele ontmoeting van Turkse vrouwen met een Vlaamse sitcom', Communicatie: Tijdschrift voor Massamedia & Cultuur, 1996, 25 (3), 32-54.
Khiti BENHACHEM, Les émissions Interwallonie RTBF - Centre de Production de Liège. La Télévision, reflet de la condition de l'immigré en Belgique francophone., Bruxelles, ULB (mémoire T10585), 1978
Claire FRACHON et Marion VARGAFTIG, Télévisions d'Europe et immigration, Paris, Institut national de l'Audiovisuel et Association Dialogue Entre les Cultures (diffusion La Documentation française), 1993
Vera GASEROW, "Le ghetto médiatique des immigrés turcs", Die Tageszeitung (Berlin), trad. fr. in: Le Courrier International (Paris), 8-14/06/1995
Pierre-Yves LAMBERT, "Taxe sur les antennes paraboliques et offre sur le câble", Nouvelle Tribune, octobre 1997
4. Sujets connexes
Stefano ALLIEVI, Albert BASTENIER, Alain BATTEGAY et Ahmed BOUBEKER, Médias et minorités ethniques. Le cas de la guerre du Golfe, Louvain-la-Neuve, Academia Bruylant - SYBIDI, 1992
ASSOCIATION GENERALE DES JOURNALISTES PROFESSIONNELS DE BELGIQUE, Recommandations pour l'information relative aux allochtones, Bruxelles, 1994 (existe également en néerlandais)
Djelloul AYADI, La communication au sein de la "communauté" algérienne de Belgique, Bruxelles, ULB (mémoire T18928), 1996
Albert BASTENIER, Felice DASSETTO, Médias U Akbar. Confrontations autour d'une manifestation, Louvain-la-Neuve, CIACO, 1987 Thérèse MANGOT, "Insertion sociale et expression culturelle. La politique de la Communauté française", in: Marie-Thérèse COENEN et Rosine LEWIN (eds.), La Belgique et ses immigrés. Les politiques manquées, Bruxelles, De Boeck Université, 1997, pp. 189-202
Philippe BENOIT, L'image médiatique du monde arabe. Rôle de l'idéologie, du pouvoir et de la logique de fonctionnement des médias. Illustration à travers le "Pourquoi Pas ?", Bruxelles, ULB (mémoire T12778), 1990
Conseil Consultatif des Populations d'Origine Etrangère de la Communauté française (CCPOE), "Les médias et les populations d'origine étrangère", Bruxelles, 25/06/1991
Pierre COOPMAN, La polémique du voile islamique: étude à travers les quotidiens belges francophones et à travers trois quotidiens français (Libération, Le Monde et La Croix), Bruxelles, ULB (mémoire T15411), 1991
Léa CURONICI, Vision de la femme immigrée dans la presse francophone. Quel stéréotype ? Quelle réalité ?, Bruxelles, ULB (mémoire T18932), 1996
Olivier DE BACKER, Les émeutes de 1991 à Forest, Molenbeek, Saint-Josse et Schaerbeek à travers les médias, Bruxelles, ULB (mémoire T16833), 1994
Manuela DE COUNE, Le racisme vis-à-vis des jeunes bruxellois d'origine musulmane. Exemples dans La Lanterne et La Dernière Heure, Bruxelles, ULB (mémoire T16829), 1994
Sylviane DEMOULIN, L'opinion publique face à l'affaire dite "du voile islamique" à travers la presse francophone belge, essentiellement écrite et en considérant l'histoire des femmes musulmanes, Bruxelles, ULB (mémoire T15930), 1992
Jean LAROCK, La Dernière Heure face aux immigrés et au racisme. Son rôle par rapport à la montée de l'extrême droite, Bruxelles, ULB (mémoire T16297), 1992
Thérèse MANGOT, "Insertion sociale et expression culturelle. La politique de la Communauté française", in: Marie-Thérèse COENEN et Rosine LEWIN (eds.), La Belgique et ses immigrés. Les politiques manquées, Bruxelles, De Boeck Université, 1997, pp. 189-202
Françoise MEDERNACH, Les médias et la femme immigrée. Analyse à travers les médias belges et luxembourgeois en 1995, Bruxelles, ULB (mémoire T19004), 1996
Ministry of Flanders, Interdepartmental Commission for Ethnic-Cultural Minorities (I.C.E.M.), Beyond the noncommittal. The Flemish ethnic-cultural minorities policy. A state of things., Brussels, 1997 (available free of charge in Dutch, French or English c/o I.C.E.M., Markiesstraat 1/2, 1000 Brussel, phone +32.2.507.32.53, fax +32.2.507.31.40)
Dogan ÖZGÜDEN, Immigration turque et mass média, Bruxelles, Info Türk, 1983
Chantal PORGES, Le racisme dans la presse écrite francophone belge, Bruxelles, ULB (mémoire T12915), 1990
E. Schelfhout, 'Media-opvoeding als mogelijkheid tot bijsturing van beeldvorming over etnische minderheden', Bareel, 1992, 13 (50), 11-13.
E. Schelfhout, 'Media en Migranten', Bindteken, 1992, 9 (35), 14-25.
E. Schelfhout, (1993) 'Opvoeden tot multi-cultureel samenleven: Het belang van media-opvoeding', Communicatio, Suid-Afrikaanse Tydskrif vir Kommunikasieteorie en -navorsing, 19 (2), 32-38.
Marion STEIN, L'immigration dans la presse belge en 1992, Bruxelles, ULB (mémoire T16874), 1994
Martine VANDEMEULEBROUCKE, "Sous le regard des médias", in: Marie-Thérèse COENEN et Rosine LEWIN (eds.), La Belgique et ses immigrés. Les politiques manquées, Bruxelles, De Boeck Université, 1997, pp.203-220
Laurence VAN LENT, La presse belge et l'immigration pendant l'année 1993, Bruxelles, ULB (mémoire T17299), 1994
H. Verstraeten, 'Media en Migranten: de symbolische dimensie', Communicatie, 1991, 20 (4), 15-24.
Zoltan Alexander VITAL, La production de l'image de l'immigré dans le journal Le Soir, Bruxelles, ULB (mémoire T14895), 1981
Bruxelles, le 3 mai 1999
Services de télévision : la Commission décide d'adresser à la Belgique un avis motivé concernant la taxation des antennes paraboliques
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Après avoir reçu des centaines de plaintes de citoyens, la Commission européenne a décidé d'adresser à la Belgique un avis motivé (deuxième étape de la procédure formelle d'infraction prévue par l'article 169 du traité CE) concernant les taxes instituées par certaines autorités communales ("communes") sur les antennes paraboliques. La Commission estime que ces taxes constituent un obstacle à la réception et à la distribution de signaux télévisuels diffusés par satellite au départ d'autres États membres, ce qui représente une infraction aux dispositions du traité CE afférentes à la libre prestation des services à l'intérieur du marché unique (article 59). La Commission pourrait décider de saisir la Cour de justice si elle ne reçoit pas des autorités belges une réponse satisfaisante dans les deux mois suivant la réception de l'avis motivé.
Ces dernières années, un certain nombre de communes belges ont institué une taxe annuelle sur la détention de chaque antenne parabolique destinée à la réception d'émissions télévisées par satellite. Selon les informations dont dispose la Commission, des taxes de cette nature sont actuellement perçues par 34 communes, dont 27 en région wallonne, 3 en région flamande et 4 dans la région de BruxellesCapitale. Les communes bruxelloises de Jette, Koekelberg, Auderghem, Watermael-Boitsfort. Schaerbeek et Woluwé-Saint-Pierre ont abrogé ces taxes au 1er janvier 1999, mais d'autres communes ont instauré de telles taxes récemment.
Dans la plupart des cas, le montant de la taxe est fixé à BEF 5 000 (environ 124 Euros) par an, mais atteint jusqu'à BEF 10 000 (environ 248 Euros) dans certaines communes. En fait, le coût qu'elles occasionnent aux utilisateurs peut atteindre, voir dépasser chaque année le prix d'achat initial d'une antenne parabolique (fréquemment vendue à moins de BEF 5 000).
La Commission considère que ces taxes constituent une désincitation à recevoir des émissions radiophoniques et télévisuelles par satellite et qu'elles représentent dès lors un obstacle aux émissions par satellite en provenance d'autres États membres. Elles ont donc pour effet de pénaliser le développement économique et technique de la radio et de la télévision par satellite en Belgique..
La Commission estime que la taxe est discriminatoire parce qu'elle affecte en particulier:
En outre, la Commission considère que la taxe est injustifiée. Certaines autorités communales soutiennent que la taxe sert à préserver l'esthétique des immeubles. Toutefois, la Commission estime que cette affirmation n'est pas fondée, étant donné que la taxe est appliquée:
De surcroît, le produit de la taxe n'est pas utilisé pour améliorer l'environnement urbain, et d'autres types d'antennes, de dispositifs de réception et de structures similaires (telles que des mâts) ne donnent pas lieu à la perception d'une taxe équivalente.
D'autres autorités communales admettent explicitement que la taxe a pour but de rendre la réception d'émissions par satellite au moins aussi coûteuse que la réception d'émissions par le réseau câblé. En effet, les personnes qui ne peuvent se raccorder au réseau câblé sont parfois exemptées de la taxe sur les antennes paraboliques, et cette taxe est dans certains cas réduite de moitié pour les détenteurs d'antennes paraboliques qui sont également abonnés au câble.
La Commission estime également que l'obligation, imposée à chaque personne souhaitant installer une antenne parabolique, d'obtenir systématiquement une autorisation préalable des autorités communales, ce qui entraîne quelquefois des coûts administratifs, est excessivement restrictive.
Selon la jurisprudence de la Cour de justice, la libre prestation des services est un principe fondamental du droit communautaire qui doit être appliqué directement par les États membres dans leur droit national. En principe, il peut être fait obligation à un État membre de rembourser une taxe perçue en violation du droit communautaire.
Services de télévision : la Commission met de nouveau en garde la Belgique concernant les taxes sur les antennes paraboliques
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DN: IP/00/237 Date: 2000-03-09
IP/00/237
Bruxelles, le 9 mars 2000
Services de télévision : la Commission met de nouveau en garde la Belgique concernant les taxes sur les antennes paraboliques
La Commission a adressé à la Belgique une lettre dans laquelle elle invite instamment le gouvernement à se conformer au droit communautaire en veillant à la suppression immédiate et définitive, à travers tout le pays, de toutes les taxes instaurées sur les antennes paraboliques et au remboursement des taxes déjà payées. La Commission estime que la taxe perçue par certaines collectivités locales ("communes") sur les antennes paraboliques constitue un obstacle à la réception et à la distribution transfrontalières de signaux de télévision, et viole par conséquent le principe de la libre prestation des services inscrit dans le traité CE (article 49). A la suite de l'avis motivé (deuxième étape de la procédure formelle d'infraction) que la Commission a adressé à la Belgique en mai 1999 (voir IP/99/281), la Flandre, la Wallonie et Bruxelles-Capitale ont déclaré vouloir se conformer au Traité, et plusieurs localités (notamment toutes les communes bruxelloises) ont, à ce jour, supprimé la taxe. La Commission a cependant reçu plusieurs plaintes dont il ressort que la taxe reste appliquée dans de nombreuses communes, surtout en Wallonie, et plus particulièrement dans certaines grandes villes comme Mons, Charleroi, Liège et Namur. De plus, selon les plaignants, les demandes de remboursement de la taxe ont, jusqu'à présent, été systématiquement rejetées par les autorités compétentes.
La Commission avait initialement ouvert la procédure d'infraction à la suite de l'instauration, par plusieurs communes belges, d'un taxe annuelle sur les antennes paraboliques. Dans la plupart des cas, la taxe a été fixée à 5 000 BEF (environ 124 euros), mais dans certaines communes, elle atteint 10 000 BEF (248 euros). Elle peut coûter annuellement aux utilisateurs un montant équivalent au prix d'achat d'une antenne.
La Commission estime que ces taxes ont pour effet, d'une part, de dissuader de recevoir des programmes par satellite d'autres Etats membres et, d'autre part, d'entraver le développement de la radio et de la télévision par satellite en Belgique. Elles violent ainsi les règles du traité CE relatives à la libre prestation des services.
La taxe est discriminatoire, car elle s'applique en particulier à certaines catégories de spectateurs et d'auditeurs (notamment ceux qui souhaitent recevoir des programmes de leur pays d'origine), aux chaînes de télévision et de radio étrangères (n'ayant pas accès au réseau câblé en Belgique, ou n'y ayant qu'un accès limité) et aux distributeurs de programmes par satellite (pénalisés par rapport aux câblodistributeurs, dont les clients ne sont pas assujettis à une taxe de cette nature, et qui sont généralement liés, au sein des "intercommunales", aux autorités locales qui instaurent ces taxes).
L'existence de la taxe ne se justifie par aucune raison objective d'intérêt général et est, en tout état de cause, disproportionnée en regard du but visé, à savoir préserver l'esthétique des bâtiments : en effet, elle est appliquée indépendamment de la taille ou de l'aspect de l'antenne, du fait qu'elle soit ou non visible, du fait qu'elle soit placée sur un immeuble ou ailleurs, par exemple dans un jardin, du fait que l'immeuble soit classé ou non, et ses recettes ne sont pas affectées à l'amélioration de l'environnement urbain, etc.
La Commission considère également que l'obligation imposée à toute personne souhaitant installer une antenne parabolique d'obtenir l'autorisation préalable des autorités locales, qui entraîne parfois des frais administratifs, est excessivement restrictive.
De plus, conformément à la jurisprudence constante de la Cour de justice, un Etat membre est en principe tenu de rembourser une taxe perçue en violation du droit communautaire. Selon les informations dont dispose la Commission, ce droit n'a pas été reconnu, jusqu'à présent, aux particuliers : leurs demandes de remboursement de la taxe, bien que présentées dans le respect des formes prescrites par la législation belge et ainsi considérées comme recevables par les autorités nationales, ont été rejetées sur le fond.
À la suite de l'avis motivé, la Commission a adressé une lettre aux autorités belges afin que les droits que confère aux particuliers la législation communautaire, et notamment l'article 49 (ex article 59) du traité CE, soient effectivement respectés en l'espèce, sans que les autorités compétentes continuent d'y faire obstacle ou d'en retarder l'exercice.
Dans cette lettre, la Commission souligne que le maintien de la taxe par certaines communes et le déni du droit à remboursement opposé aux particuliers pourrait conduire la Commission à assigner la Belgique devant la Cour de justice.
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