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Electeurs, candidats et élus allochtones aux élections communales de 8 octobre 2000

Pierre-Yves Lambert,
chercheur indépendant,
gestionnaire du site
http://www.suffrage-universel.be

publié dans: Étienne Arcq, Pierre Blaise et Vincent de Coorebyter, Les résultats des élections communales du 8 octobre 2000. II, Courrier Hebdomadaire (Centre de Cecherches sur les Institutions Socio-Politiques, Bruxelles) n° 1753-54 (juin 2002), pp.48-54

1. L'électorat

1.1. Electeurs belges d'origine étrangère

L'accroissement considérable du nombre d'électeurs d'origine étrangère, surtout en région bruxelloise, a constitué une donne importante de ces élections communales, chaque liste s'efforçant de refléter par sa composition la diversité ethnique de la population, s'ajoutant à la nouvelle règlementation en matière de parité sexuelle et, en région bruxelloise, à la présence de candidats flamands, la plupart des listes ayant un caractère bicommunautaire.

Dans une commune en particulier, Saint-Josse (région bruxelloise), des comptages officieux ont été effectués par des candidats à partir des listes d'électeurs avant les élections régionales de 1995 et de 1999, sur base des patronymes: les électeurs d'origine arabe sont passés de 9,5% à 18,1% et ceux d'origine turque de 4,8% à 12%.

Il faut toutefois noter que les effets de la nouvelle législation en matière d'acquisition de la nationalité, entrée en vigueur en mai 2000, ne se sont pas encore fait sentir, les retards pris par les administrations communales et les parquets ayant eu pour conséquence que plusieurs milliers de personnes ayant introduit leur dossier un mois avant la clôture des listes d'électeurs (le 31 juillet), soit dans les délais légaux de traitement de leur dossier, n'ont obtenu la nationalité qu'en septembre, voire plus tard.

1.2. Electeurs étrangers ressortissants d'Etats membres de l'Union Européenne

Pour la première fois, les résidents étrangers ressortissants d'un autre Etat membre de l'Union Européenne pouvaient devenir électeurs ou candidats, toutefois il leur fallait préalablement s'inscrire sur des registres électoraux spéciaux, l'inscription automatique ayant été considérée comme inacceptable eu égard à l'obligation de vote qu'elle aurait entraîné. Le résultat a été fort décevant, moins d'un électeur potentiel sur cinq a effectué cette démarche, avec de grandes variations suivant les nationalités, les régions, provinces et communes. Plusieurs parlementaires ont interpellé les ministres fédéral et régionaux compétents à diverses reprises, mais le ministre de l'Intérieur a fini par s'interroger ouvertement quant au pourcentage de Belges qui s'inscriraient si une telle démarche leur était imposée.

Electeurs européens potentiels et inscrits par nationalité (Ministère de l'Intérieur Direction Elections : 14/08/2000 et La Meuse 25/09/00)

nationalité

électeurs potentiels

électeurs inscrits

%

Italie

182.884

44.758

24,5%

France

93.269

14.784

15,8 %

Pays-Bas

75.702

11.615

15,3 %

Espagne

41.005

5.046

12,3 %

Allemagne

28.715

3.867

13,4 %

Grande-Bretagne

21.319

1.973

9,2 %

Portugal

19.662

1.363

6,9%

Grèce

16.154

2.554

15,8%

Luxembourg

3.974

740

18,6 %

Suède

3.424

232

6,8%

Irlande

2.716

272

10%

Danemark

2.533

275

10,9%

Finlande

2.167

133

6,1%

Autriche

1.830

246

13,4%

Total

495.354

87.858

17,6%

 

Electeurs européens potentiels et inscrits par province
(
Ministère de l'Intérieur Direction Elections : 14/08/2000)

Provinces

Electeurs potentiels

Electeurs inscrits

%

Anvers

44.613

4.982

11,2%

Brabant flamand

32.903

4.170

12,7%

Flandre occidentale

11.476

1.225

10,7%

Flandre orientale

12.513

1.453

11,6%

Limbourg

41.529

8.351

20,1%

Flandre

143.034

20.181

14,1%

Brabant wallon

17.783

3.581

21,7%

Hainaut

117.073

28.923

24,7%

Liège

78.844

18.053

22,9%

Luxembourg

7.971

1.868

23,4%

Namur

13.364

3.732

25,2%

Wallonie

235.035

56.157

18,5%

Bruxelles

120.246

11.520

9,6%

Belgique

498.315

87.858

17,6%

[les totaux par nationalités et par provinces ne coïncident pas, le motif en est que le service élections a tiré ces statistiques à partir du Registre National à des dates différentes]

 

2. La campagne électorale

2.1. Les socialistes bruxellois et les querelles entre candidats d'origine marocaine

Dans certaines communes bruxelloises, en 1999 comme en 2000, il a été constaté que certains candidats PS et leurs supporters ont mené des campagnes de dénigrement contre des colistiers ou d'autres candidats jugés "trop peu musulmans". A ce sujet, Alain Hutchinson, vice-président de la fédération bruxelloise du PS, a d'ailleurs déclaré au lendemain des élections: "Pendant la campagne électorale, plusieurs candidats ont dénoncé certains des leurs comme étant de mauvais musulmans parce qu'ils buvaient du vin, parce qu'elles ne portaient pas le foulard, etc. C'est très dangereux. Ils doivent bien se dire qu'ils ne sont pas élus pour représenter leur communauté, mais pour représenter toute la population belge, particulièrement sa frange la plus fragilisée. Au PS, je souhaite qu'il y ait un débat rapidement sur cette question." (Le Matin 31/10/00).

 

2.2. Les socialistes gantois et le bourgmestre d'Emirdag

A Gand, où vit une importante communauté originaire de Turquie, principalement de la région d'Emirdag, un tract bilingue fut diffusé, dans lequel le bourgmestre social-démocrate de cette ville appelait ses compatriotes expatriés à voter massivement pour la liste de son collègue socialiste gantois. L'initiative entraîna la diffusion d'un second tract bilingue, à l'intiative cette fois des candidats d'origine turque de la liste écologiste, soutenus par la sénatrice belge d'origine turque Meryem Kaçar, elle-même gantoise.

 

2.3. Les candidats bruxellois originaires de Turquie

A Schaerbeek et à Saint-Josse, les deux communes regroupant l'essentiel de la communauté originaire de Turquie en région bruxelloise, les bourgmestres sortants avaient effectué des visites à Emirdag avant les élections, et le premier, qui menait une liste de droite, diffusa une photo le montrant à côté de son collègue d'Emirdag. La question des relations entre certains candidats et des organisations turques comme les Loups Gris (extrême-droite) et Milli Görüs (islamistes) fut évoquée, la plupart d'entre eux réfutant tout lien avec elles devant des interlocuteurs non-turcs, au grand dam de militants de ces organisations qui faisaient campagne pour eux. On peut toutefois noter que le seul candidat dont les liens avec Milli Görüs étaient de notoriété publique a obtenu le plus mauvais résultat parmi les élus originaires de Turquie à Saint-Josse, ce qui relativise l'implication, ou l'impact, des "fédérations" dans le scrutin. Comme un an plus tôt pour les législatives, la presse turque a abondamment commenté tant la campagne que les résultats.

 

3. Les élections

Il est difficile d'évaluer le nombre d'élus étrangers ressortissants de l'Union Européenne, la méthode de détection patronymique ne permettant pas de les distinguer de leurs (ex-) compatriotes de nationalité belge, sans parler de l'invisibilité sur ce plan des Français, Néerlandais, Luxembourgeois, Allemands et Autrichiens. Toutefois ils ne semblent pas avoir été fort nombreux par comparaison avec l'importance numérique de leurs communautés, le PS a par exemple annoncé qu'il en comptait 40 dans ses rangs sur 1.845 élus (Elections d'octobre 2000 : résultats et analyse, note au Bureau du Parti, 23.10.2000). Par contre, il semble qu'en Wallonie ces électeurs aient renforcé les scores du PS, sans porter nécessairement leurs suffrages sur des candidats de même origine.

Dans les communes à statut spécial, le seul cas où les équilibres communautaires belgo-belges ont été renversés par l'apport de voix "étrangères" a été les Fourons, où les électeurs néerlandais ont permis à la liste flamande de l'emporter alors qu'à l'élection directe du Conseil de l'aide sociale, où seuls les Belges pouvaient voter, la liste francophone l'a emporté.

Par contre, le nombre d'élus d'origine non-européenne a fait un bond, alors qu'ils n'étaient que 2 en 1988 et 28 en 1994, ils sont désormais 154, dont 92 pour la seule région bruxelloise, qui compte en tout environ 650 conseillers communaux.

Candidats d'origine non-européenne élus (communes et districts) en octobre 2000 (1994) - répartition par régions et origines

 

Bruxelles

Flandre

Wallonie

BELGIQUE

Monde arabe

77 (13)

25 (8)

12 (5)

114 (26)

Turquie

10 (0)

16 (0)

3 (1)

28 (1)

Afrique noire

3 (0)

1 (1)

3 (0)

7 (1)

Iran

1 (0)

0 (0)

2 (0)

3 (0)

Amérique latine

1 (0)

0 (0)

0 (0)

1 (0)

TOTAL

92 (13)

42 (9)

20 (6)

154 (28)

 

Candidats d'origine non-européenne élus (communes et districts) en octobre 2000 (1994) - répartition par régions, provinces et partis

Provinces/Régions

socialistes

écologistes

sociaux-chrétiens

libéraux

autres

TOTAL

Anvers

8 (1)

7 (1)

2 (1)

0 (0)

 

17 (3)

Brabant flamand

2 (1)

2 (1)

0 (0)

0 (0)

 

4 (2)

Flandre occidentale

1 (1)

0 (0)

2 (1)

0 (0)

 

3 (2)

Flandre orientale

4 (1)

3 (0)

0 (0)

0 (0)

 

7 (1)

Limbourg

8 (0)

0 (0)

3 (0)

0 (0)

1

11 (1)

Région flamande

23 (4)

12 (3)

7 (2)

0 (0)

 

42 (9)

Brabant wallon

0 (0)

1 (0)

0 (0)

1 (0)

 

2 (0)

Hainaut

5 (2)

1 (0)

0 (0)

1 (0)

 

7 (2)

Liège

7 (3)

3 (0)

0 (1)

0 (0)

 

10 (4)

Namur

1 (0)

0 (0)

0 (0)

0 (0)

 

1 (0)

Région wallonne

13 (5)

5 (0)

0 (1)

2 (0)

 

20 (6)

Région bruxelloise

39 (6)

33 (5)

7 (0)

13 (2)*

 

92 (13)

Belgique

75 (15)

50 (8)

14 (3)

15 (2)

 

154 (28)

* dont 2 FDF en 1994 et 7 en 2000

Ainsi qu'il apparaît clairement dans le tableau ci-dessous, dans les communes bruxelloises, à peine plus d'un quart des élus d’origine maghrébine se trouvaient initialement en ordre utile sur leur liste. Il serait toutefois illégitime de postuler, comme l'ont fait certains, qu'il y aurait eu "vote en bloc" (stemblok) pour ces candidats: les résultats individuels diffèrent considérablement entre candidats de même origine sur une même liste. Par contre, la réforme de la dévolution de la case de tête a sorti pleinement ses effets, le choix des électeurs a donc primé sur celui des partis, au contraire de ce qui s'était passé en 1994.

élus d’origine maghrébine qui figuraient en ordre utile/ élus d’origine maghrébine

1994

2000

socialistes

1/6

12/37

écologistes

3/5

5/31

libéraux

1/2

4/6

sociaux-chrétiens

0/0

0/3

total

5/13

21/77

 

Il faut noter deux cas particuliers, la liste PSC à Schaerbeek et la liste PRL-FDF-VLD à Molenbeek où il y avait en 2000 un(e) candidat(e) d’origine marocaine en ordre utile (respectivement en 3ème et en 10ème position) qui n'a pas été élu(e) mais où un candidat de même origine situé respectivement en 17ème et 28ème position a, lui été élu. Par contre, cas unique parmi les élus de 1994 qui n'avaient pas démissionné entretemps, un écologiste d’origine marocaine de Saint-Josse n’a pas retrouvé son siège, et son collègue socialiste l’a retrouvé de justesse, ce qui indique bien que les électeurs n’ont pas voté de la même manière pour tous les candidats de même origine. L'élu PS avait obtenu le troisième meilleur score personnel, toutes listes confondues, en 1994, alors qu'en 2000 il est le dernier élu de sa liste, avec un score quasiment inchangé.

D'un autre côté, il semble à première vue qu'Ecolo, à de rares exceptions près, n'avait pas privilégié dans la composition de ses listes l'intégration de candidats d'origine arabe à des places visibles et "sûres", ce alors que, il faut le rappeler, les campagnes individuelles sont bannies dans ce parti et qu'il n'est donc a priori pas prévu qu'un candidat "remonte" grâce à un score personnel. Il faut toutefois nuancer ce propos en rappelant que les prévisions accordaient d'importants gains en sièges pour ce parti, et que le concept d'ordre utile doit donc être relativisé en tenant compte du nombre de sièges escomptés plutôt que du nombre d’élus sortants, contrairement aux listes PS où on attendait plutôt une diminution du nombre de sièges.

Dans la famille socialiste, plusieurs élus sortants ont perdu leur siège au profit d'un colistier d'origine maghrébine. Chez les écologistes, ce sont surtout des candidats non encore élus qui ont ainsi été dépassés par des allochtones, des femmes ou des Flamands.

 

4. Désignation des échevins

Il y a 11 échevins d'origine non-européenne (7 Marocains, 3 Turcs et 1 Algérienne) en région bruxelloise, où 3 communes en comptent 3 chacune. Initialement, 5 avaient pour compétences la jeunesse, les sports, l'intégration sociale, la petite enfance etc., 1 les classes moyennes et l'emploi, 2 avaient le portefeuille des finances, 2 celui de l'enseignement, 1 des travaux publics. Début 2002, une échevine de la Ville de Bruxelles a reçu à la place de la jeunesse la compétence de l'enseignement, qui est un des principaux mandats vu le nombre d'écoles communales et de personnels concernés. Il faut noter aussi qu'un échevin cumule des compétences inhabituelles, finances, jeunesse et culture, ce qui correspondait à sa volonté d'avoir une visibilité sociale et politique moins ingrate que les finances.

Seuls trois élus (2 Marocains et 1 Turc) se sont vu attribuer des mandats en Flandre pour la culture, l'environnement, les sports ou le bien-être et l'intégration. Une quatrième (Marocaine) a obtenu un demi-mandat de 3 ans pour l'enseignement.

Un seul échevin wallon est d'origine non-européenne (Marocain), avec pour compétences la culture, la santé et la petite enfance.

Sur ces 16 échevins belges d'origine non-européenne, 11 sont socialistes (8 PS, 3 SP), 3 écologistes (2 Ecolo, 1 Agalev) et 2 libéraux (MR).

Divers incidents ont émaillé la désignation par les nouvelles coalitions d'échevins d'origine marocaine ou turque. Le cas schaerbeekois a été médiatisé tant dans la presse francophone que néerlandophone, par contre les situations à Anvers, Beringen et Forest n'ont pas eu d'écho dans l'autre communauté.

A Schaerbeek, sous le mandat précédent, le PS, qui est un petit parti dans cette commune (4 sièges sur 47), détenait l'échevinat de l'instruction publique, dont le titulaire était un militant laïc radical qui avait notamment refusé de voter en faveur de la création d’une intercommunale chargée de mettre sur pied un cimetière multiconfessionnel. Pour cause d’incompatibilité statutaire (au PS) touchant les deux élus ayant obtenu les meilleurs scores, le troisième en voix de la liste, Mohamed Lahlali, fut désigné, étant entendu que si un secrétaire d’Etat régional quittait ses fonctions ministérielles, l’échevinat lui reviendrait d’office. Dès que le nom du futur échevin fut connu, une vingtaine de directeurs et d’enseignants "laïques" d’écoles communales schaerbeekoises adressèrent des courriers à diverses instances, dont la présidence du PS local, mettant en doute la "laïcité" de Monsieur Lahlali (dont un des enfants est scolarisé dans une école catholique) et demandant que lui soit préféré l'ancien titulaire. En fin de compte, la manoeuvre de ce dernier a échoué, et il a décidé de siéger comme indépendant.

A Schaerbeek - encore - un conseiller d’origine turque avait imprudemment annoncé dans une émission radio en turc un semaine après les élections qu’il était assuré de devenir "bourgmestre-adjoint". Aucun élu de cette origine n'ayant en fin de compte été sélectionné par la fédération libérale, une délégation d’élus de cette communauté effectua une démarche insolite auprès du chef de file… d’Ecolo, alors qu’ils avaient tous été élus sur des listes de droite, PRL-FDF ou Liste du Bourgmestre (Duriau, ex-FDF) ! Le bourgmestre sortant ne se priva d'ailleurs pas de jeter de l'huile sur le feu dans son discours-testament politique au conseil communal (Le Soir 20/10/00): "J'espère que les présidents de parti auront à cœur de présenter comme échevins ceux qui auront récolté le plus de voix de préférence. Je pense en particulier aux candidats d'origine immigrée qui risquent fort d'avoir la désagréable impression de n'avoir été appelés que comme appâts des suffrages de leurs communautés.". Le message fut entendu par le président du PRL, et un élu FDF d'origine turque fut désigné comme échevin des finances.

Dans la commune bruxelloise de Forest, la coalition majoritaire, composée des socialistes, des écologistes et de dissidents libéraux, devait intégrer un échevin écologiste d'origine marocaine. S'estimant injustement écarté malgré un excellent score personnel, un élu PS d'origine marocaine, suivi par un deuxième, a fait défection, permettant ainsi à l'opposition libérale et sociale-chrétienne de devenir majoritaire. Toutefois, la loi exige qu'un échevin soit présenté par la majorité de la liste sur laquelle il a été élu, il n'a donc pas pu être récompensé politiquement par ses nouveaux alliés. Il a formellement nié avoir reçu une compensation financière pour sa défection.

A Anderlecht, la nouvelle majorité libérale-écologiste compte quatre élus d’origine maghrébine, mais aucun ne deviendra échevin, ce que regrettait devant les caméras de télévision M'Hammed Boumahdi, un nouvel élu FDF membre du cabinet d’un échevin sous la législature précédente, aussitôt après les élections: "Il est malheureux que sur la commune d'Anderlecht on ne pourra pas ou on ne proposera pas un échevinat au travers lequel les communautés d'origine étrangère comprennent les votes et que les gens qui votent pour les voies de l'immigration comprennent qu'on les prend au sérieux." (JT RTBF 9/10/00).

L'écologiste Fatima Bali a été réélue triomphalement au conseil communal d'Anvers pour un troisième mandat, mais son parti a désigné d'autres élus pour ses deux échevinats au sein de la majorité VLD-CVP-SP-Agalev, ce qu'elle a très mal pris, cette déconvenue venant après d'autres. Au point que la presse a annoncé, début novembre, son probable départ d’Agalev. Quoiqu’elle ait dénoncé ces rumeurs (De Standaard 6/11/00), elle n’en a pas moins rappelé qu’un certain nombre de personnes estiment qu’elle devrait avoir des responsabilités dans la nouvelle équipe scabinale, et que "mes électeurs ne comprendraient pas que leur voix soit à nouveau mise sur une voie de garage".

L’affaire a pris une tournure plus inquiétante pour Agalev fin novembre, quand deux conseillers écologistes d'origine marocaine du district de Borgerhout [les districts, une nouvelle institution existant déjà dans les grandes villes aux Pays-Bas, correspondent à Anvers aux anciennes communes fusionnées, des mairies d’arrondissement en quelque sorte comme à Paris, Lyon ou Marseille] - l’un étant d’ailleurs le suppléant de Fatima Bali -, annoncèrent qu’ils siégeraient comme indépendants et mettraient sur pied un mouvement politique immigré au cas où Fatima Bali ne deviendrait pas échevine (De Morgen 22/11/00). Au même moment, l'Union des Mosquées et Associations Musulmanes d'Anvers (UMIVA), qui rassemble pas moins de 26 mosquées, a pris publiquement position en faveur de l'attribution d'un échevinat à Fatima Bali, précisant que "si les élus immigrés ne sont pas pris au sérieux et doivent se contenter de servir d'attrape-voix, nous devrons en tirer les conclusions la prochaine fois"… En fin de compte, Fatima Bali n'est pas devenue échevine, elle n'a pas non plus quitté Agalev, mais les deux conseillers de district ont mis sur pied un nouveau mouvement politique autonome.

Début décembre, Marc Van Peel, tête de liste et ancien président du CVP, annonça qu'en fin de compte il souhaitait devenir échevin à Anvers en plus de son mandat de parlementaire, brisant ainsi les ambitions de Nahima Lanjri, deuxième de la liste, qui avait ainsi devancé tous les échevins CVP sortants, y compris son colistier qui devint le second échevin de ce parti. Du coup, elle a déclaré au quotidien De Morgen (4/12/00) "Je me demande vraiment sérieusement si ça a du sens de continuer", "je suis déçue et maintenant j'ai le droit de déterminer pour moi-même ce que je vais faire dorénavant, je veux aussi donner un signal". Cependant, contrairement à Fatima Bali, elle ne s'est pas plus profilée sur des thèmes liées aux communautés allochtones que sur des thèmes généralistes, et elle a affirmé ne pas croire que son origine ait joué un rôle dans sa mise à l'écart. En guise de compensation, elle a été nommée chef du groupe CVP au conseil communal, et semble assurée de devenir députée régionale en 2004.

Dans la commune limbourgeoise de Beringen, la coalition CVP-VLD, qui était très marquée par le discours sécuritaire et xénophobe du bourgmestre, a perdu la majorité à cause des gains du Vlaams Blok. Dès qu'il est apparu que la coalition sortante s'allierait au SP, et qu'un élu d'origine turque de ce parti obtiendrait un échevinat, le Blok se proposa comme alternative, pour "éviter le pire", répandant dans les cafés l'"information" selon laquelle, en cas de désignation de cet échevin, les enfants des écoles communales seraient bientôt soumis à l'enseignement obligatoire du turc... Selahettin Kocak est finalement devenu le seul échevin SP pour un mandat complet, les autres devant se succéder à mi-mandat pour un même poste.


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