Suffrage Universel
Citoyenneté, démocratie, ethnicité et nationalité en France
Elus d'origine non-européenne en France
Harlem DESIR
1959: naissance à Paris, d'un père antillais et d'une mère alsacienne
1999: élu (PS) au Parlement européen sur la liste PS-PRG-MDC
page sur le site du Parlement Européen
M. Harlem DÉSIR
Groupe parlementaire du Parti socialiste européen, Membre
Parlement européen, Membre
Commission de l'industrie, du commerce extérieur, de la recherche et de l'énergie, Membre
Commission de l'emploi et des affaires sociales, Membre suppléant
Délégation pour les relations avec les États-Unis, Vice-président
Membres du Parlement européen à l'Assemblée
parlementaire paritaire de l'accord conclu entre les États
d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique et l'Union
européenne (ACP-UE), Membre
France
Parti socialiste
Né le 25 novembre 1959, Paris
Licencié en philosophie (Sorbonne, 1983). Membre du Conseil
économique et social (1989-1994 et 1997-1999), rapport sur les
associations à but humanitaire (Documentation Française
1994).
Membre du bureau national de l'Union nationale des étudiants de
France - indépendante démocratique (UNEF i.d.)
(1983-1984). Président fondateur de SOS Racisme (1984-1992).
Secrétaire national aux relations avec le mouvement social du
Parti Socialiste (1995-1997). Membre du Conseil national du Parti
Socialiste (depuis 1994), membre du bureau national du Parti Socialiste
(depuis 1997).
Candidat aux élections législatives à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) en 1997.
Président fondateur de la Fédération internationale de SOS Racisme (1985-1992).
http://www.africagora.org/Assises_communautes.pdf
" 1ères Assises Nationales des Communautés Noires de France "
Samedi 6 avril 2002 – Assemblée Nationale, Paris
Sous le patronage de M. Christian PONCELET, Président du Sénat
" Quelle place pour les Noirs dans la société française ? "
SYNTHESE DES INTERVENTIONS ET ECHANGES AVEC LES REPRESENTANTS DES CANDIDATS A L’ ELECTION PRESIDENTIELLE FRANCAISE DE 2002
Pour M. BAYROU, M. Alain LAMASSOURE, Ancien Ministre, Vice Président de l’UDF et Député européen
Pour M. JOSPIN, M. Harlem DESIR, Député européen et conseiller municipal d’Aulnay-sous-Bois
Pour M. MADELIN, M. Jean-Félix MOULOUNGI, Membre de Démocratie Libérale, conseil en communication
Pour M. MAMERE, M. Stéphane POCRAIN, Porte-parole des Verts et de Noël MAMERE
Pour Mme TAUBIRA, Me Angèle LOUVIER, Avocate
Intervention d'Harlem DESIR, représentant du candidat Lionel JOSPIN pendant la campagne des présidentielles 2002
Je voudrais d’abord remercier le Président d’Africagora, Dogad Dogoui, au nom de Lionel Jospin, candidat à l’élection présidentielle, pour son invitation. Vous transmettre les salutations et les vœux de succès pour ces premières assises nationales des communautés noires de France de Lionel Jospin.
Assises qui font suite à une tournée qui a commencé au mois de novembre, et qui, comme le disait tout à l’heure Alain Lamassoure sont une première, même si, je ne crois pas qu’on puisse découvrir aujourd’hui totalement la place et le rôle des populations issues d’Afrique, issues des départements d’outre-mer, des Antilles en particulier, mais aussi de la Réunion.
Je crois qu’on ne peut pas quand même oublier que après tout, les questions que nous nous posons aujourd’hui sont posées depuis longtemps, qu’il y a eu un président du Sénat, par exemple, qui s’appelait Gaston Monnerville et qui était lui-même noir, issu des Antilles et qu’effectivement le lien entre l’Afrique et la France entre les populations afro-caribéennes et la France sont des liens extrêmement anciens.
Pour autant, les problèmes de discrimination, de place des Noirs dans la société française continuent a être posés et vous avez le mérite de vouloir les reposer sous un angle en partie renouvelé, notamment celui de la place dans la vie économique, celui d’une place, d’une visibilité, d’un rôle qui ne se limite pas uniquement aux domaines les plus acceptés aujourd’hui que sont le sport, la musique, la création culturelle, mais d’une participation beaucoup plus générale aux sphères de décision, à la création de richesses, à la responsabilité politique.
Finalement je crois que nous aurons véritablement remporté ce combat lorsque nous n’aurons même plus besoin - comme le faisait tout à l’heure le représentant du candidat Alain Madelin - de devoir souligner que même si cela peut paraître étrange, et bien c’est après tout normal qu’il puisse y avoir des Noirs dans des formations politiques extrêmement différentes. Et qu’il puisse aussi y en avoir effectivement dans les courants de droite, dans les courants libéraux alors qu’historiquement en raison des combats anti-coloniaux, en raison aussi de la situation socio-économique de beaucoup de migrants issus des départements d’outre-mer ou d’Afrique, il est vrai que les Noirs ont eu, et ont encore majoritairement toujours, plutôt une inclination vers la gauche.
Alors, nous sommes confrontés à une difficulté. Cette discrimination qui persiste, ces freins, ces préjugés qui empêchent effectivement une reconnaissance pleine et entière de celles et ceux qui sont issus d’immigration africaine ou caribéenne, suscitent un sentiment communautaire je dirais, peut être de nature un peu communautariste. Il y a nous le savons tous dans les groupes antillais et aussi africains, cette idée que finalement, malgré les discours sur l’égalité, malgré la loi contre le racisme, malgré les directives européennes contre les discriminations, nous n’arrivons pas à obtenir que les Noirs aient toute la place qui devrait être la leur dans cette société. Malgré l’ancienneté, encore une fois, des liens historiques, malgré l’importance, y compris numérique, de la population noire dans notre pays.
D’où cette idée qu’il faudrait constituer d’une certaine façon un lobby communautaire pour faire reconnaître au moins les problèmes de discrimination qui persistent et la place et l’apport des populations noires dans notre pays. Je crois que là, nous sommes effectivement face à une réalité : si comme vous le dites dans une formule, alors que la nation est métissée, l’Etat reste monocolore, alors que la société est composée d’hommes et de femmes d’origines diverses, la représentation qu’elle donne d’elle-même au travers de la télévision reste monocolore à un point qui est d’ailleurs totalement choquant et absurde et qui fait sur des petites chaînes de TV nouvelles d’information économique, comme Bloomberg par exemple, on voit plus de présentateurs de couleur qu’on peut en voir sur des chaînes du service public. Ce qui ne laisse pas de nous interroger quand on sait que très souvent que les arguments qui étaient opposés à ceux qui disaient " faudra-t-il un jour finir par mettre des quotas pour que vous acceptiez qu’il y ait des présentateurs d’origine arabe, d’origine africaine, d’origine antillaise ? L’argument qui était opposé, était que malheureusement on manquait de journalistes compétents, que bien volontiers on en aurait mis davantage, mais qu’on n’avait pas des gens qui avaient suivi les cursus des écoles spécialisées. Alors, s’ouvrent des chaînes économiques, on a besoin de journalistes hyper pointus, hyper compétents qui soient à la fois de bons présentateurs et de bons spécialistes de sujets qui demandent un très haut niveau de qualification, et là on en voit à foison et il n’y a plus d’obstacle. Donc, il y a bien des problèmes.
C’est vrai que la première affirmation, je crois nécessaire et indispensable, que tant que persisteront ces phénomènes de discrimination, de barrières qui se mettent devant les trajectoires individuelles d’hommes et de femmes de talent, simplement parce qu’ils sont Noirs, parce qu’ils sont issus d’immigration, nous verrons se renforcer le sentiment que la seule manière de renverser cela est de créer une logique de communautarisme.
Moi je crois qu’il faut effectivement faire place et reconnaître l’existence de sentiments communautaires, que ce soit des communautés religieuses ou d’origines, mais en même temps tout faire pour éviter de sombrer dans le communautarisme, c’est-à-dire, quand même s’accrocher à l’idée que c’est l’égalité qui est la bonne réponse et que pour promouvoir l’égalité, il peut être nécessaire c’est vrai, d’en passer par des formes de discrimination positive, mais je dirai non pas sous la forme de quotas, mais plutôt sous la forme (et c’est une partie d’ailleurs de la signification du terme " affirmative action " aux Etats-Unis) qui ne concerne pas que les quotas, mais qui sont ceux de faire un effort volontariste pour que l’égalité soit réellement respectée. C’est-à-dire faire en sorte que, quand on constate un décalage important dans le personnel d’une collectivité locale, d’une municipalité, entre le nombre des habitants issus des immigrations, issus des populations noires, mais aussi d’immigrations qui sont pas forcément uniquement noires (qui peuvent être maghrébines ou d’Europe centrale) et le nombre de celles et ceux de cette origine qui travaillent dans les services municipaux, on fasse un effort de rattrapage. Qu’on se dise qu’il doit y avoir déblocage et qu’il faut faire un effort particulier. De même quand à la télévision on fait ce constat, il nous faire cet effort, qu’on essaye d’identifier les causes pour apporter les réponses.
De ce point de vue, je crois que dans l’examen que vous avez évoqué des directives européennes contre la discrimination, l’une qui couvre l’ensemble des discriminations en raison de l’origine et de la race et l’autre plus spécifiquement dans le monde du travail, il devrait être examiné, l’opportunité de créer au-delà des observatoires tels que le 114 aujourd’hui, ou des CODACS mis en place dans les préfectures, la nécessité ou l’opportunité de créer quelque chose, une autorité administrative du même type que la Commission des droits de la personne au Canada ou que la Commission pour l’Egalité Raciale en Grande-Bretagne, c’est-à-dire une autorité qui soit capable de mener elle-même des enquêtes lorsqu’il y a de toute évidence ou d’après des témoignages nombreux, des problèmes de discrimination dans un champ professionnel, dans l’accès au logement, dans l’accès à des stages pour nos collégiens ou lycéens des filières professionnelles, dans l’accès à un certain nombre d’emplois publics. IL faut qu’alors cette autorité puisse apporter la force de son témoignage devant les tribunaux si l’action en justice est nécessaire et qu’elle puisse aussi émettre des propositions pour essayer de remédier à ces difficultés.
Enfin pour terminer parce qu’il faut respecter la règle de limitation de temps que vous avez déterminée, il y a un certain nombre de mesures qui peut-être ont surtout une portée symboliques mais qui peuvent aussi avoir leur importance. Pendant cette mandature législative qui s’achève, la majorité, que j’ai soutenue et le gouvernement qui était conduit par Lionel Jospin, ont accepté de soutenir une proposition de loi déposée par la députée Christiane TAUBIRA, qui est aussi par ailleurs candidate à l’élection présidentielle pour une autre formation politique, demandant à ce que l’Assemblée Nationale et donc notre pays reconnaisse enfin que l’esclavage et la traite des Noirs.
Bâtir un avenir commun, comme disait Ernest Renan, une communauté de destin, pour parler de la Nation, qui transcende les différentes origines, les différences de croyances, qui est fondée sur les principes de la république laïque, mais on ne pourra bâtir cet avenir commun que sur une reconnaissance des erreurs, des crimes, des fautes du passé et sur un regard lucide sur les conséquences qui en ont découlé.
Deuxièmement, dans un tout autre ordre d’idées, une des propositions du candidat Lionel Jospin, pour cette élection présidentielle, est la mise en œuvre enfin de ce vieil engagement du droit de vote pour les étrangers – Applaudissements - qui résident dans nos communes, aux élections locales. Je crois que même si beaucoup des enfants de ces résidents étrangers, qui sont nés en France, ont en vertu du code de la nationalité et du droit du sol que nous avons rétabli (alors que les lois Pasqua les avaient supprimées ou remises en cause) même si beaucoup d’entre eux sont des citoyens à part entière, sont inscrits sur les listes électorales, peuvent voter à toutes les élections. C’est un geste aussi à l’égard de ces jeunes que de donner à leurs parents qui parfois ont conservé la nationalité du pays d’origine, auquel ils sont attachés parce qu’ils se sont battus pour l’indépendance de ce pays, pour la reconnaissance de sa personnalité propre, que de leur donner cette citoyenneté de résidence à laquelle nous voulons également associer un accès plein et égal aux emplois publics.
Cela aussi, c’est un élément de la transposition des directives européennes, qui demandent que toutes les discriminations puissent être examinées et que dans chacun des pays on fasse un effort maximal y compris ici, même si la directive n’y oblige pas absolument pour ce qui concerne les emplois publics, car si on peut encore comprendre que en matière de sécurité nationale, de défense, de services de renseignements (encore que là aussi on embauche des étrangers, même dans l’armée, il y a une légion
étrangère), il y a encore une notion de nationalité, quand il s’agit de la poste, de l’hôpital public, des emplois communaux, on ne voit pas pourquoi, dans une hypocrisie complète, on ne pourrait embaucher celles et ceux qui sont de nationalité étrangère qu’avec un statut de contractuel pour faire exactement le même job que ceux qui sont de nationalité française, mais qui sont les seuls eux à pouvoir bénéficier d’un statut de fonctionnaire et d’un véritable emploi public. Je crois que cela aussi fait partie des discriminations et des mesures qu’il faudra prendre.
Enfin, et en un mot pour terminer, je crois que tout cela y compris parce que vous êtes très investis dans le champ économique, doit aussi nous amener à reconsidérer l’importance du rôle que peuvent jouer les Africains et les Caribéens qui vivent dans notre pays pour de nouvelles relations y compris économiques et de co-développement avec les pays du sud et en particulier avec l’Afrique. Je ne crois pas que ces relations puissent être basées uniquement sur le libre échange, sur les politiques d’ajustement structurel du FMI ou de la Banque Mondiale, je crois qu’il faut un équilibre entre ce qui est fait pour attirer les investissements privés et vos entreprises peuvent jouer un rôle, et puis d’un autre côté un retour à une politique plus ambitieuse d’aide publique au développement, de coopération et notamment dans les domaines tout à fait vitaux de l’accès aux biens publics mondiaux, l’eau, la santé, les médicaments, l’énergie, etc.
Applaudissements
Tout ce qui permet à une activité économique de se développer, de se diversifier et à partir de là, aux investissements, aux échanges, je dirais de nature plus marchands, de véritablement pouvoir être des moteurs du développement. Je crois que dans ce moment où une prise de conscience se fait, que bâtir un monde juste et sûr pour tous les peuples ne peut se concevoir dans l’indifférence des pays du Nord à l’égard des pays du Sud. Nous avons un devoir tout à fait particulier de donner véritablement sa chance à l’Afrique de reprendre sa place dans le concert des nations, mais pour cela je pense que, l’action, je ne dirai pas communautariste, mais je dirai en tout cas l’action citoyenne et d’élévation de la conscience que joueront les Noirs de France vis-à-vis des pouvoirs publics pourra certainement être déterminante pour que l’on sorte de cette espèce d’indifférence mortifère qui abandonne l’Afrique au sous-développement et que l’on reconnaisse ses talents, ses potentiels et que réellement nous l’accompagnions dans une nouvelle voie. Je vous remercie.
Applaudissements.
http://www.idf.europesocialiste.org/article/fichepersoview/300?PrintableVersion=enabled
Harlem DESIR
Circonscription régionale
Ile-de-France
Seine Saint Denis
Né le 25 novembre 1959 à Paris
Père de deux enfants
Député Européen
Conseiller municipal d’Aulnay-sous-Bois (93)
Depuis 1999, Harlem Désir est député au Parlement européen
Membre de la Commission de l’Industrie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l’Energie, et Membre suppléant de la Commission de l’Emploi et des Affaires sociales, il suit les dossiers traitant :
- de la politique commerciale commune,
- de l’OMC, du secteur de l’énergie,
- des services publics,
- des droits des travailleurs,
- des programmes de lutte contre l’exclusion
- de la politique de développement.
Il est Vice-Président de la délégation pour les relations avec les Etats-Unis et membre de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP/UE (Accords de Coopération avec les pays d’Afrique, Caraïbes et du Pacifique).
Animateur des Forums Parlementaires Mondiaux créés lors des premiers Forums Sociaux Mondiaux (Porto Alegre, Mumbaï), il s’inscrit dans le mouvement altermondialiste, et travaille aux réponses politiques à apporter aux questions soulevées par les mouvements sociaux mondiaux.
Fondateur et Président de l’intergroupe " Taxation du capital, Fiscalité, Mondialisation ", à l’origine du premier vote au Parlement européen sur la taxe Tobin.
Il est également membre de la coordination Attac/Institutions européennes.
Depuis 1994, il est membre du Conseil national du PS
1995 à 1997: Secrétaire national chargé des relations avec le mouvement social
1997 : Membre du Bureau national
2003 : Responsable national chargé des questions européennes
De 1989 à 1999, il est membre du Conseil Economique et Social, et auteur d’un rapport " Sur la situation et le devenir des associations à but humanitaire ".
De 1995 à 1997, il coordonne une enquête européenne sur le logement des jeunes et l’exclusion.
De 1984 à 1992, il est Président et membre fondateur de SOS Racisme
1985-1992 : Président de la Fédération internationale de SOS Racisme
1982 : Licencié en Philosophie (Université Paris 1)
1982-1984 : Membre du Bureau national de l’UNEF-ID
Publications
"Touche pas à mon pote" (Grasset 1985)
"SOS Désirs" (Calmann Levy 1987).
Rapport sur la situation et le devenir des Associations à but humanitaire (Documentation Française, 1994).
Lui écrire :
harlem.desir@europesocialiste.org